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Plongée dans ‘Africa Must Unite’ de Kwame Nkrumah et sa vision pour l’unité africaine

Littérature

Plongée dans ‘Africa Must Unite’ de Kwame Nkrumah et sa vision pour l’unité africaine

Par Mathieu N'DIAYE 3 janvier 2024

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Lisez ‘Africa Must Unite‘ de Kwame Nkrumah, une œuvre panafricaine essentielle qui plaide pour l’unité et l’autonomie de l’Afrique. Nofi vous propose sa fiche de lecture approfondie qui explore les thèmes clés et l’impact de ce livre visionnaire. Idéal pour les passionnés d’histoire africaine et de politique. Rejoignez-nous pour une exploration enrichissante de ce texte crucial dans la compréhension du panafricanisme et de l’avenir de l’Afrique.

Dans un climat mondial où les questions d’unité et d’autodétermination des nations prennent une importance croissante, « Africa Must Unite » de Kwame Nkrumah se dresse comme une lecture incontournable. Publié en 1963, ce livre visionnaire offre une analyse perspicace et un appel passionné à l’unité africaine dans le sillage de la décolonisation1. À travers cette fiche de lecture, nous plongeons dans l’esprit de Nkrumah, explorant ses arguments convaincants pour une Afrique unifiée et économiquement indépendante. Cet article vise non seulement à fournir un aperçu détaillé de l’œuvre, mais aussi à encourager nos lecteurs à découvrir par eux-mêmes la puissance et la pertinence de ce texte, qui continue de résonner dans les discussions actuelles sur le panafricanisme2 et l’avenir du continent africain.

Titre et date de l’œuvre :

Africa Must Unite

« Africa Must Unite » (l’Afrique doit s’unir en français) est un ouvrage écrit par Kwame Nkrumah, publié en 1963. Ce livre, relevant du genre politique et historique, aborde le thème de l’unité africaine et de la décolonisation. C’est devenu un texte fondamental dans la littérature panafricaine, reflétant la vision de Nkrumah pour une Afrique unie et indépendante.

Courte biographie de l’auteur et ses autres œuvres majeures :

Africa Must Unite

Kwame Nkrumah (1909-1972) était un homme politique ghanéen, leader du mouvement pour l’indépendance du Ghana, et son premier président après l’indépendance en 1957. C’est une figure clé du panafricanisme et a joué un rôle majeur dans la promotion de l’unité africaine. Parmi ses autres œuvres importantes, on trouve « Consciencism: Philosophy and Ideology for Decolonization » (1964) et « Neo-Colonialism, the Last Stage of Imperialism » (1965). Voici une frise chronologique simplifiée retraçant les moments clés de la vie de Kwame Nkrumah :

  • 1909 : Naissance de Kwame Nkrumah à Nkroful, Gold Coast3 (actuel Ghana).
  • 1935-1945 : Études aux États-Unis, où Nkrumah est influencé par les idées panafricaines et anticoloniales.
  • 1945 : Participation au 5ème Congrès Panafricain4 à Manchester, en Angleterre, aux côtés de W.E.B. Du Bois5 et George Padmore6.
  • 1947 : Retour à la Gold Coast et implication dans le mouvement pour l’indépendance.
  • 1949 : Fondation du Convention People’s Party (CPP)7, un parti politique militant pour l’indépendance.
  • 1951 : Nkrumah devient le premier Premier ministre de la Gold Coast.
  • 1957 : La Gold Coast obtient son indépendance et devient le Ghana, avec Nkrumah comme premier Premier ministre et plus tard président.
  • 1960 : Le Ghana devient une république avec Nkrumah comme premier président.
  • 1963 : Publication de « Africa Must Unite« , plaidant pour l’unité africaine.
  • 1966 : Renversement de Nkrumah par un coup d’État militaire pendant qu’il est en voyage en Chine.
  • 1966-1972 : Exil en Guinée, où Nkrumah continue de promouvoir le panafricanisme.
  • 1972 : Décès de Kwame Nkrumah à Bucarest, en Roumanie.

Résumé d' »Africa Must Unite » :

C’est un ouvrage influent écrit par Kwame Nkrumah, publié en 1963. Dans ce livre, Nkrumah, alors président du Ghana, expose sa vision pour l’avenir de l’Afrique dans le contexte postcolonial. Il plaide pour l’unité politique et économique de l’ensemble du continent africain, considérant cela comme essentiel pour la prospérité, la stabilité et l’autodétermination de l’Afrique face aux influences extérieures et au néocolonialisme8.

Nkrumah commence par analyser la situation de l’Afrique à l’époque, marquée par la fragmentation politique et la dépendance économique. Il souligne que les frontières héritées du colonialisme ont divisé le continent en petits États, souvent trop faibles pour être économiquement viables ou pour exercer une influence significative sur la scène mondiale. Pour Nkrumah, cette division est un obstacle majeur au développement et à l’unité africaine.

L’ouvrage aborde également le concept de néocolonialisme, où les anciennes puissances coloniales continuent de contrôler et d’exploiter les économies africaines, malgré l’indépendance politique formelle des nations africaines. Nkrumah soutient que l’unité africaine est le seul moyen de résister efficacement à cette forme de domination et d’assurer un développement économique autonome.

Nkrumah propose des solutions concrètes pour atteindre l’unité africaine. Il préconise la création d’un gouvernement fédéral pour toute l’Afrique, avec des politiques économiques et des systèmes de défense communs. Il insiste sur la nécessité de planifier le développement économique à l’échelle continentale, en mettant l’accent sur l’industrialisation et l’autosuffisance.

Somme toute, « Africa Must Unite » est un appel à l’action pour les dirigeants et les peuples africains. Nkrumah exhorte à la solidarité et à la coopération pour surmonter les divisions ethniques, régionales et nationales, et pour réaliser la vision d’une Afrique unie et forte.

Ce livre est considéré comme un texte fondamental dans la littérature panafricaine et reste pertinent pour comprendre les défis et les aspirations de l’Afrique contemporaine.

Les thèmes principaux :

L’unité africaine, le néocolonialisme, le développement économique, la politique africaine

Analyse et réflexions autour de chaque thème :

L’unité africaine : Nkrumah insiste sur l’importance de l’unité africaine pour la libération et le progrès du continent. Il argumente que sans unité, les pays africains resteront faibles et divisés, incapables de résister à l’influence extérieure ou de réaliser leur plein potentiel. Nkrumah envisage une union politique et économique africaine, similaire à une fédération, qui pourrait défendre les intérêts du continent sur la scène mondiale.

« Nous, qui luttons pour l’unité de l’Afrique, sommes parfaitement conscients de la bonté de nos intentions. Nous avons besoin de la force combinée de nos peuples et de nos ressources pour nous protéger du danger imminent d’un retour du colonialisme sous une fausse apparence. Nous avons besoin de cette force pour lutter contre les puissances enracinées qui divisent notre continent et continuent à maintenir des millions de nos frères dans l’esclavage. Nous avons besoin de cette force pour décréter la libération totale de l’Afrique et pour faire avancer la construction d’un système socio-économique qui permettra à la grande masse de notre population, en augmentation constante, d’atteindre des niveaux de vie comparables à ceux des pays les plus avancés. »

Africa Must Unite (1963), Kwame Nkrumah, ed. Présence Africaine, 2009, p. 329

Le néocolonialisme : Nkrumah aborde le concept de néocolonialisme, où les anciennes puissances coloniales maintiennent leur influence économique et politique en Afrique, malgré l’indépendance formelle des pays. Il met en garde contre les dangers de cette nouvelle forme de domination, qui entrave le développement véritable et l’autonomie des nations africaines.

« Alors qu’ici en Afrique, où l’objectif d’unité est incontournable, nous faisons de notre mieux pour concentrer nos efforts dans cette direction, les néocolonialistes recourent à tous les moyens pour les contrecarrer, en encourageant la formation de communautés basées sur l’identité linguistique de leurs anciens colonisateurs. Nous ne pouvons pas nous permettre d’être aussi désorganisés et divisés. Le fait que je parle anglais ne fait pas de moi un citoyen anglais. De même, le fait que certains d’entre nous parlent français ou portugais ne fait pas de nous des citoyens français ou portugais. Nous sommes des Africains, un point c’est tout ; et en tant qu’Africains, nos intérêts les plus élevés ne peuvent être promus que par notre union en une communauté africaine, que ni le Commonwealth ni une communauté franco-africaine ne peuvent remplacer.

Pour nous, l’Afrique et ses îles forment un tout. Nous rejetons l’idée de toute subdivision. De Tanger ou du Caire au nord, au Cap au sud, du Cap Guardafui à l’est, aux îles du Cap Vert à l’ouest, l’Afrique est une et indivisible. »

Africa Must Unite (1963), Kwame Nkrumah, ed. Présence Africaine, 2009, p. 328

Le développement économique : L’accent est mis sur la nécessité d’une stratégie de développement économique autonome pour l’Afrique. Nkrumah prône l’utilisation des ressources africaines pour le bénéfice des Africains et suggère que l’unité économique est cruciale pour surmonter la pauvreté et le sous-développement.

« En dépit de toutes les oppositions, hostilités flagrantes et machinations qui ont sapé son succès, en dépit de l’effroyable dévastation et des pertes matérielles et humaines causées par la Seconde Guerre mondiale, l’Union soviétique est parvenue en un peu plus de trente ans à construire une machine industrielle si puissante et si avancée qu’elle a pu lancer le Spoutnik et, peu de temps après, le premier vol habité dans l’espace. On ne peut ignorer que des prouesses de cette ampleur ont été rendues possibles par un système de planification continentale, soutenu par des programmes d’inspiration socialiste clairement définis, et c’est un fait que je prends comme exemple de ce qu’un programme économique intégré pourrait représenter pour l’Afrique. »

Africa Must Unite (1963), Kwame Nkrumah, ed. Présence Africaine, 2009, p. 263

La politique africaine : Nkrumah explore les défis politiques auxquels l’Afrique est confrontée dans sa quête d’unité. Il discute de la nécessité de surmonter les divisions ethniques et régionales et propose la création d’institutions panafricaines pour faciliter la coopération et l’intégration.

« Dans un monde divisé entre des fronts opposés et des factions en guerre, si l’Afrique est désunie, elle ne peut que succomber. Patrice Lumumba, qui avait vu et vécu de près les maux engendrés par la désunion au Congo, a défendu ce point de vue avec beaucoup de conviction lorsqu’il est venu à Accra en août 1960. Tout le monde ne sait peut-être pas qu’à cette occasion, il s’est dit prêt à collaborer le plus étroitement possible avec les autres États africains indépendants pour créer une Union des États africains.
Les divergences entre les États africains indépendants ne manquent pas. Nous avons des différends frontaliers et une multitude d’autres problèmes interterritoriaux qui ne peuvent être résolus que dans le cadre d’une unité africaine. »

Africa Must Unite (1963), Kwame Nkrumah, ed. Présence Africaine, 2009, p. 238

Dans « Africa Must Unite« , Nkrumah utilise son expertise et son expérience en tant que leader politique pour offrir une vision profonde et pragmatique de l’avenir de l’Afrique. Son plaidoyer pour l’unité africaine reste une référence importante pour les discussions sur le panafricanisme et le développement du continent.

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Notes et références

  1. Décolonisation : Processus historique par lequel les colonies ont acquis leur indépendance des puissances coloniales européennes, principalement après la Seconde Guerre mondiale. Ce mouvement a été marqué par une série de luttes nationales, des négociations politiques et, dans certains cas, des conflits armés. La décolonisation a conduit à la redéfinition des frontières politiques, à l’émergence de nouveaux États-nations et à des changements significatifs dans les relations internationales. Elle a été influencée par divers facteurs, y compris les changements dans les attitudes mondiales envers l’impérialisme, l’évolution des économies coloniales, et les idéaux de liberté et d’autodétermination. Des figures telles que Mahatma Gandhi en Inde, Kwame Nkrumah au Ghana, et Nelson Mandela en Afrique du Sud ont été des leaders emblématiques de ce mouvement. La décolonisation a également eu un impact profond sur les sociétés coloniales et postcoloniales, entraînant souvent des défis politiques, économiques et sociaux. ↩︎
  2. Panafricanisme : Mouvement politique, culturel et social qui a émergé au début du XXe siècle, promouvant l’unité et la solidarité des peuples africains et de la diaspora africaine. Il vise à encourager et à renforcer les liens de solidarité entre tous les peuples d’origine africaine, à lutter contre le colonialisme et le néocolonialisme, et à promouvoir l’autodétermination et le développement économique de l’Afrique. Des figures emblématiques comme W.E.B. Du Bois, Marcus Garvey, et plus tard Kwame Nkrumah, ont été des acteurs clés dans la promotion et l’évolution de ce mouvement. ↩︎
  3. Gold Coast : Ancien nom de la région qui est aujourd’hui connue sous le nom de Ghana, en Afrique de l’Ouest. La Gold Coast était une colonie britannique établie au XIXe siècle, connue pour ses richesses en or, d’où son nom. La région a joué un rôle important dans le commerce transatlantique, notamment dans le commerce des esclaves. Au cours du XXe siècle, la Gold Coast est devenue un centre de l’activisme anticolonial, menant à son indépendance de la Grande-Bretagne en 1957. Cette indépendance, largement attribuée au leadership de Kwame Nkrumah, a marqué un tournant dans l’histoire de la décolonisation africaine, la Gold Coast étant le premier pays d’Afrique subsaharienne à obtenir son indépendance de la domination coloniale européenne. Le pays a alors été rebaptisé Ghana, en référence à l’ancien Empire du Ghana, symbolisant ainsi un nouveau départ et une reconnexion avec l’héritage précolonial africain. ↩︎
  4. 5ème Congrès Panafricain : Important événement dans l’histoire du mouvement panafricain, le 5ème Congrès Panafricain s’est tenu à Manchester, en Angleterre, en octobre 1945. Ce congrès a marqué un tournant décisif dans le mouvement panafricain, car il a mis l’accent sur la lutte pour l’indépendance et la fin du colonialisme en Afrique. Des figures clés telles que Kwame Nkrumah du Ghana, Jomo Kenyatta du Kenya, et W.E.B. Du Bois des États-Unis, ainsi que d’autres leaders africains et de la diaspora africaine, y ont participé. Le congrès a adopté une approche plus radicale et militante, appelant à l’indépendance immédiate des pays africains et à la fin de la domination raciale. Les résolutions et les discussions de ce congrès ont eu une influence significative sur les mouvements d’indépendance ultérieurs dans de nombreux pays africains. ↩︎
  5. W.E.B. Du Bois : William Edward Burghardt Du Bois (1868-1963) était un intellectuel, sociologue, historien, et militant des droits civiques afro-américain. Pionnier dans l’étude des problématiques afro-américaines, il a été le premier Afro-Américain à obtenir un doctorat de l’Université Harvard. Co-fondateur de l’Association Nationale pour la Promotion des Gens de Couleur (NAACP) et éditeur de son magazine, « The Crisis« , Du Bois a joué un rôle crucial dans le mouvement des droits civiques aux États-Unis. Il est également reconnu pour son implication dans le mouvement panafricain, ayant organisé plusieurs congrès panafricains et promu l’unité et la solidarité entre les peuples africains et de la diaspora. Ses œuvres les plus célèbres incluent « The Souls of Black Folk » et « Black Reconstruction in America« . En fin de vie, déçu par le racisme persistant aux États-Unis, il s’est installé au Ghana, où il a continué son travail jusqu’à son décès. ↩︎
  6. George Padmore : Né Malcolm Ivan Meredith Nurse en 1903 à Trinidad, George Padmore était un écrivain, journaliste et militant politique influent. Il est reconnu pour son rôle majeur dans le mouvement panafricain et son engagement dans la lutte anticoloniale. Padmore a travaillé étroitement avec Kwame Nkrumah et a joué un rôle clé dans l’organisation du 5ème Congrès Panafricain à Manchester en 1945. Ses écrits et son activisme ont fortement influencé les mouvements d’indépendance en Afrique et dans les Caraïbes. Padmore est également connu pour ses critiques du communisme stalinien et pour son plaidoyer en faveur de l’unité africaine et de l’autodétermination des peuples africains. Il est décédé en 1959 à Londres. ↩︎
  7. Convention People’s Party (CPP) : Le Convention People’s Party (CPP) est un parti politique du Ghana, fondé par Kwame Nkrumah en 1949. Le CPP a été créé dans le but de lutter pour l’indépendance du Ghana, alors connu sous le nom de Gold Coast, de la domination coloniale britannique. Sous la direction de Nkrumah, le CPP a adopté une approche panafricaine et anticoloniale, prônant l’unité africaine et l’émancipation des peuples africains. Le parti a joué un rôle central dans le mouvement d’indépendance du Ghana, qui a abouti à l’indépendance du pays en 1957. Après l’indépendance, le CPP est devenu le parti dominant au Ghana, avec Nkrumah comme premier président. Le parti a mis en œuvre des politiques de développement économique et social, mais a également été critiqué pour son autoritarisme. Le CPP a été interdit après le coup d’État de 1966 qui a renversé Nkrumah, mais a été par la suite réhabilité et reste actif dans la politique ghanéenne contemporaine. ↩︎
  8. Néocolonialisme : Terme utilisé pour décrire une forme de domination, souvent économique et politique, exercée par d’anciennes puissances coloniales ou d’autres influences extérieures sur des pays indépendants, en particulier dans le contexte postcolonial. Le néocolonialisme se manifeste par le contrôle indirect, où les pays anciennement colonisés restent dépendants et influencés par les pays développés, malgré leur indépendance politique formelle. Cette influence peut se faire à travers divers moyens, tels que les investissements économiques, les prêts, les conditions de commerce, ou la culture. Le terme a été popularisé par Kwame Nkrumah dans le contexte de l’Afrique postcoloniale pour décrire la continuation de l’exploitation et de l’ingérence des anciennes puissances coloniales dans les affaires des nations nouvellement indépendantes. ↩︎