La bataille d’Insamankou ou la cuisante défaite des Britanniques face à l’empire Ashanti

Nofi vous propose d’explorer les détails de la Bataille d’Insamankou, un tournant décisif dans les guerres Anglo-Ashanti. Découvrez comment l’empire Ashanti a infligé une défaite mémorable à l’armée britannique, marquant une étape significative dans la lutte pour l’indépendance et la résistance africaine. Rejoignez-nous pour une plongée profonde dans cette confrontation historique et ses répercussions durables

Le 21 janvier 1824, un affrontement historique se déroule lors de la Première Guerre Anglo-Ashanti : la bataille d’Insamankou. Dans ce conflit mémorable, l’armée de l’Empire Ashanti, dirigée par l’Asantehene1 Osei Bonsu, affronte les forces coloniales britanniques commandées par le Brigadier-Général Sir Charles MacCarthy. Cette rencontre cruciale se termine par une victoire remarquable de l’Empire Ashanti, marquant une étape significative dans la résistance africaine contre la colonisation. Découvrez les stratégies, le courage et les conséquences de ce combat qui a façonné l’histoire de l’Afrique de l’Ouest.

Fanti contre Ashanti : le clash des titans Akan2 au Ghana

Insamankou
Capitaine ashanti représenté dans une aquatinte de 1820 de William Hutton

Dans l’embrasement du XIXe siècle, la terre qui deviendra la République du Ghana se transforme en un échiquier géant où s’affrontent les puissantes Confédérations Fanti3 et Ashanti4. Imaginez un empire, l’Empire Ashanti, puissant et imposant, régnant sur les terres intérieures de la Gold Coast5, une zone dorée d’Afrique de l’Ouest. En face, sur les rivages battus par les vagues, les Fanti, cousins des Ashanti, dessinent une ligne côtière de défense et de culture.

C’est une rivalité qui remonte à la nuit des temps, où chaque groupe, animé par des sentiments de trahison et de désunion, regarde l’autre avec méfiance. Les Fanti, s’alliant avec les Britanniques, et les Ashanti, avec les Néerlandais, montrent comment même les frères peuvent devenir adversaires sous le ciel orageux de l’histoire.

Flashback, 1806 : l’Asantehene Osei Bonsu6, roi des Ashanti, lance une accusation explosive – pillage de tombes par les Fanti. Vrai ou faux ? Le mystère plane encore. Mais ce qui est sûr, c’est que cette étincelle enflamme la poudrière. Les Ashanti, avec leur puissance militaire, écrasent les Fanti lors d’une bataille épique près de Cape Coast7.

Dans un élan de victoire, les Ashanti, ivres de succès, se retournent contre le Fort de Koromantin8, bastion de leurs alliés néerlandais. Les Britanniques, jouant les pacificateurs, offrent le vieux roi Kwadwo Otibu en sacrifice, apaisant temporairement les Ashanti. Mais le vent tourne vite : l’évasion d’un captif attise les flammes de l’animosité entre Britanniques et Ashanti.

Pour les Fanti, ce chapitre de leur histoire reste marqué par l’amertume et la rancœur. Frères d’armes devenus frères ennemis, leur destin se tisse dans un récit complexe de trahisons, d’alliances et de luttes pour la souveraineté et l’identité.

Vers la première guerre Anglo-Ashanti : l’aube d’un conflit majeur

Insamankou

Dans le tourbillon des affrontements historiques, la puissante Confédération Ashanti, guidée par l’astucieux Osei Bonsu, s’engage audacieusement dans une guerre d’invasion contre les tribus Akyem et Akuapem entre 1814 et 1816. Le but ? Étendre son territoire jusqu’aux rivages scintillants, offrant à l’Empire un accès direct à la mer, un objectif stratégique majeur pour le souverain.

Mais cette expansion fulgurante ne passe pas inaperçue. Les puissances coloniales britanniques, néerlandaises et danoises de la région, conscientes de la montée en puissance de l’Empire Ashanti, se trouvent dans l’obligation de pactiser avec lui. La Confédération Ashanti, forte d’une impressionnante armée de 20 000 hommes, devient la superpuissance militaire d’Afrique de l’Ouest9.

Dans ce contexte tendu, l’African Company of Merchants10, soucieuse de protéger ses intérêts commerciaux, signe un traité d’amitié reconnaissant la souveraineté de l’Empire Ashanti sur une vaste étendue de la côte. Mais le vent tourne lorsque la Compagnie africaine des marchands est dissoute et que les Britanniques prennent le contrôle de la Gold Coast, confiant à Sir Charles McCarthy l’autorité sur cette zone convoitée, y compris les terres récemment annexées par les Ashanti.

Alors que les années 1820 déroulent leur tapis de changements, les Britanniques, dans un jeu d’alliances changeant, s’unissent à la Confédération Fanti, les ennemis ancestraux des Ashanti. Cette alliance Anglo-Fanti déclenche la colère de l’Empire Ashanti. Comment peuvent-ils accepter d’être dominés non seulement par les Européens, mais aussi par les Fanti, eux qui sont les dignes descendants du tabouret d’or, symbole de leur souveraineté, donné par Nyame11 Lui-même ? Le seuil de tolérance est franchi. Les tensions montent, les alliances se fragilisent, et le tambour de la guerre commence à résonner, annonçant l’inévitable confrontation entre l’Empire Ashanti et les forces Britanniques.

Le début des hostilités : première guerre Anglo-Ashanti

Soldats blessés transportés vers des navires-hôpitaux.

Imaginez une jungle dense, le chant des oiseaux interrompu par le crépitement des armes à feu. C’est dans cet environnement que se joue le premier acte dramatique de la Première Guerre Anglo-Ashanti. Tout commence par un coup de théâtre : l’enlèvement et l’assassinat d’un Sergent britannique du Royal African Colonial Corps par un groupe de guerriers Ashanti. Ce n’est pas un simple acte de violence, mais une tactique calculée pour attirer les forces coloniales dans un piège mortel. La ruse fonctionne : 10 soldats britanniques tombent, 39 autres sont blessés, et les survivants battent en retraite, marquant une victoire stratégique pour les Ashanti.

Mais les Britanniques, sous la ferme direction de Sir Charles MacCarthy, ne sont pas prêts à capituler. Refusant de céder aux revendications des Ashanti concernant le territoire côtier Fanti, MacCarthy orchestre une réponse militaire massive. Il rassemble une force imposante :

  • 80 braves du Royal African Colonial Corps
  • 170 membres déterminés de la milice de Cape Coast
  • 240 guerriers Fanti, prêts à défendre leur terre

Trois autres détachements sont prêts à rejoindre le combat :

  • 600 hommes du Royal African Colonial Corps renforcés par 3 000 combattants indigènes
  • 100 soldats et miliciens sous le commandement d’Alexander Gordon Laing, accompagnés de 2 000 guerriers locaux
  • 300 soldats et miliciens appuyés par une armée de 6 000 enrôlés indigènes

La stratégie britannique est simple et audacieuse : encercler l’adversaire et lancer une offensive sur tous les fronts. Ainsi s’ouvre le premier chapitre de la Première Guerre Anglo-Ashanti, un conflit qui s’étendra sur huit longues années, écrivant des pages sanglantes dans l’histoire et modelant le destin de la région pour les générations à venir.

La bataille d’Insamankou : lorsque l’hymne britannique rencontra les tambours de guerre Ashanti

Sir Charles MacCarthy, (1764-1824).

La scène est prête : la veille de la bataille, Sir Charles MacCarthy établit son campement sur les berges tranquilles de la Pra12. Mais le calme avant la tempête est trompeur. Le 21 janvier, à 14 heures, le choc des armées est imminent. Face à eux, les Britanniques découvrent une armée Ashanti impressionnante, forte de 20 000 guerriers déterminés.

MacCarthy, dans un élan d’optimisme audacieux, croit qu’un air d’hymne Britannique suffira à rallier des soldats africains à sa cause. Mais il se heurte à la réalité dure et implacable : les Ashanti répondent non pas avec des trahisons, mais avec le retentissement puissant de leurs tambours de guerre. La fidélité et l’unité sont des valeurs gravées dans l’âme des guerriers Ashanti.

La bataille s’engage, féroce et sans merci. Les Britanniques, dépassés en nombre et en stratégie, subissent une défaite cuisante. En un éclair, la majorité de leurs forces est décimée, ne laissant qu’une vingtaine de soldats pour témoigner de la débâcle. MacCarthy, le stratège trop optimiste, est touché mortellement, son second tombe à ses côtés, et un troisième officier est capturé par l’ennemi.

Le récit de l’officier capturé est digne d’une épopée : sa survie tient du miracle, grâce à un chef Ashanti qui le reconnaît et choisit de l’épargner. C’est dans une hutte, en compagnie des têtes décapitées de MacCarthy et Wetherell, que l’officier passe ses mois de captivité – des témoins silencieux de la défaite et des trophées de guerre pour les Ashanti.

Et pour couronner cette tragédie, le crâne de MacCarthy, doré et transformé en récipient, devient un symbole de la victoire Ashanti. Une fin macabre pour l’ambitieux MacCarthy, et un rappel que dans l’histoire, les hymnes ne suffisent pas toujours pour triompher dans la guerre.

Les récits des témoins oculaires de la mort de sir MacCarthy ont déclaré :

« Il vit l’Enseigne Wetherell, également blessé, près de Sir Charles. Certains Ashantis essayaient de lui couper la tête et lui avaient déjà infligé une fracture à l’arrière de son cou. Heureusement, un Ashanti d’autorité vint et reconnaissant M. Williams, dont il avait reçu une certaine gentillesse, retint la main de l’agresseur. Sur le fait que M. Williams récupère ses sens, il vit les troncs sans tête de Sir Charles McCarthy , M. Buckle et de l’Ensigne Wetherell. Au cours de sa captivité, il fut logé sous une hutte de chaume, dans la même pièce que les têtes qui, en raison d’un processus particulier, étaient dans un état de conservation parfait ».

La bataille d’Insamankou fut l’une des défaites les plus sanglantes et humiliantes de l’armée Britannique sur le continent africain. Ce fut aussi le début des Guerres Anglo-Ashanti qui ne prendront fin qu’en 1901.

Leçons de l’Insamankou : un héritage de courage et de réflexion

Dans le tumulte de l’histoire, la Bataille d’Insamankou se dresse comme un monument à la fois tragique et instructif. Ce chapitre sanglant, marqué par la bravoure, la stratégie et l’inévitable brutalité de la guerre, nous rappelle que chaque conflit porte en lui des histoires humaines profondément touchantes. Les actes de courage, les moments d’horreur, et même les gestes inattendus de clémence tissent la trame complexe de notre passé.

Les témoignages de la bataille, avec leurs récits viscéraux de survie et de perte, nous invitent à réfléchir sur les conséquences des conflits et sur la valeur de l’humanité même dans les moments les plus sombres. La chute de figures telles que Sir Charles MacCarthy et l’Enseigne Wetherell nous rappelle que derrière chaque nom cité dans les livres d’histoire, il y a une vie, des rêves, et un héritage qui perdure.

Alors que nous tournons la page de la Bataille d’Insamankou, n’oublions pas les leçons qu’elle nous enseigne sur le courage, la résilience, et l’espoir. Puissions-nous tous tirer des enseignements de ces récits du passé pour forger un avenir où la compréhension et la paix prévalent sur le conflit et la discorde.

Explorez l’héroïsme et la stratégie derrière la bataille d’Insamankou

La Bataille d’Insamankou est un moment clé de l’histoire des Ashanti, témoignant de leur courage, de leur ingéniosité militaire, et de leur détermination face à l’adversité. Cet événement historique, riche en leçons de résilience et de tactique, est une source d’inspiration et un rappel puissant de la grandeur des civilisations africaines.

Découvrez sur Nofi.media l’histoire complète de la Bataille d’Insamankou, des protagonistes qui ont marqué cet affrontement à son impact durable sur la région et au-delà. Plongez dans les détails de cette confrontation épique pour comprendre non seulement les enjeux mais aussi l’esprit indomptable du peuple Ashanti.

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Notes et références :

  1. L‘Asantehene est le monarque absolu de la Confédération Ashanti. ↩︎
  2. Les Akans sont une population d’Afrique de l’Ouest installée principalement au Ghana et en Côte d’Ivoire. ↩︎
  3. La Confédération Fanti fut, à la fois une alliance libre d’États Fanti datant du XVIe siècle, mais aussi à une union de courte durée formé en 1868 et dissoute en 1874. La Confédération Fanti fut l’un des premiers Mouvements d’autonomie africains. ↩︎
  4. La Confédération Ashanti, (1701-1957) était un empire situé dans le Ghana moderne. Les Ashanti ont obtenu très tôt des armes à feu, ce qui leur a permis, associé à leur génie martial, de façonner un État qui s’étendait du centre du Ghana jusqu’à la Côte d’Ivoire actuelle. En raison de ses prouesses militaires, de ses richesses, de son architecture, et de sa culture raffinée, la Confédération Ashanti fut plus largement étudiée que de nombreuses autres cultures autochtones de l’Afrique subsaharienne. ↩︎
  5. La Gold Coast était l’ancien nom européen d’une partie de la côte occidentale africaine du golfe de Guinée. Elle correspond essentiellement à la côte de l’actuel Ghana. Comme pour d’autres noms de côtes africaines (comme la Côte d’Ivoire ou la côte des Esclaves), ce nom fut donné par les Européens en fonction des « ressources » que le littoral offrait aux puissances commerciales d’Europe. ↩︎
  6. Osei Bonsu (1779-1824) fut Asantehene de 1804 à 1824. Durant son règne, les Ashanti ont affronté  la Confédération Fanti et ont dominer le commerce de la région de la Gold Coast. En Akan, Bonsu signifie la baleine (le plus grand et le plus puissant « poisson » de la mer) et symbolise l’extension de l’Empire Ashanti à la côte. Il battit les Anglais en 1824 à Bonsaso lors de la Bataille d’Insamankou. ↩︎
  7. Cap Coast fut fondée par le peuple d’Oguaa. C’est la ville principale des Fanti. ↩︎
  8. Fort Koromantin (ou Fort Amsterdam) a été construit par les Anglais entre 1638 et 1645. Il passa sous le contrôle de  la Compagnie néerlandaise des Indes Occidentales en 1665. Par la suite, le fort sera vendu aux Britanniques en 1868. Il est situé à Abandze au nord-est de Cape Coast dans la région centrale du Ghana. ↩︎
  9. Harold E. Raugh, « The Victorians at War, 1815–1914: an Encyclopedia of British Military History« , ABC-CLIO, 2004 ↩︎
  10. L’African Company of Merchants (la Société africaine des marchands) était une société britannique de commerce opérant entre 1752 et 1821 dans la région de la Gold Coast, zone côtière dominée par les Fanti. ↩︎
  11. Nyame est le Dieu du peuple Akan. Son nom signifie « celui qui sait et voit tout » et « omniscient, omnipotent dieu du ciel » en langue Akan. ↩︎
  12. Le Pra est une rivière du Ghana. Au XIXème siècle, le Pra a servi de frontière entre la Confédération Ashanti et la Gold Coast. ↩︎
Mathieu N'DIAYE
Mathieu N'DIAYE
Mathieu N’Diaye, aussi connu sous le pseudonyme de Makandal, est un écrivain et journaliste spécialisé dans l’anthropologie et l’héritage africain. Il a publié "Histoire et Culture Noire : les premières miscellanées panafricaines", une anthologie des trésors culturels africains. N’Diaye travaille à promouvoir la culture noire à travers ses contributions à Nofi et Negus Journal.

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