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Pour Chadwick Boseman, c’est T’Challa l’ennemi dans « Black Panther »

Divertissement

Pour Chadwick Boseman, c’est T’Challa l’ennemi dans « Black Panther »

Par Mathieu N'DIAYE 5 mars 2018

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Des déclarations de Chadwick Boseman qui mettent en exergue les nombreux débats de la communauté noire pour départager qui est le véritable héros de Marvel’s Black Panther.

Le 18ème volet du Marvel Cinematic Universe à fait couler beaucoup d’encre (et de salive) au sein de la communauté. Laissons de coté les critiques n’ayant rien de constructives et autres bavardages complotistes à ceux qui s’en contentent, pour nous concentrer sur une lecture du film que nous considérons particulièrement pertinente. Et si N’jadaka, alias Erik Killmonger, le sympathique méchant de Black Panther, était en fait le véritable héros auquel les spectateurs noirs pouvaient plus facilement s’identifier ?

Chadwick Boseman

Erik Killmonger est tellement méchant que sa tenue ressemble à s’y méprendre à celle de Végeta, le Sayajin nationaliste de Dragon Ball Z. Hasard ou réalité scientifique ?

Erik Killmonger Stevens (Michael B. Jordan) est certes un assassin psychopathe aux méthodes radicales, mais reconnaissons lui la noblesse de sa cause, éminemment plus convaincante que le « méchant » de cinéma lambda. Il désir avant tout, venger la mort de son père assassiné alors qu’il n’était qu’un enfant. Mais son dessein ne s’arrête pas là. Ce natif d’Oakland (ville où fut fondé le Black Panther Party en 1966) s’identifiant à la souffrance des populations noires à travers le monde, souhaite utiliser la technologie avancée du Wakanda afin de les libérer de l’oppression de l’impérialisme occidental. Il s’agit là d’objectif foncièrement révolutionnaire, dans la droite lignée des luttes indépendantistes africaines des années 1960, mais aussi du nationalisme noir d’organisations radicales, telles la Black Liberation Army, auquel appartenait Assata Shakur ou encore le New Black Panther Party de feu, Khalid Abdul Muhammad. Après tout, Malcolm X n’avait-il pas dit « by any means necessary » ?

Nombreux sont ceux qui, notamment sur la toile, ont regretté que N’jadaka ne soit à ce point diabolisé et que T’Challa ne lui ôte finalement la vie. Ne serait-ce pas là une manière détournée de nous faire comprendre que l’émancipation des Noirs n’est qu’une vilaine utopie ? Que seuls les « nègres de maison » resteront en vie en fin de compte ? A la lecture de qui vient d’être énoncé, certains d’entre vous pensent peut-être qu’il s’agit là d’une interprétation bancale et que faire de T’Challa le véritable ennemi du film n’a aucun sens. Pourtant, Chadwick Boseman, l’acteur de 42 ans qui incarne le nouveau souverain du Wakanda est du même avis.

Mardi 27 février 2018, alors qu’il discutait avec l’actrice Lupita Nyong’o et l’écrivain et journaliste Ta-Nehisi Coates (qui a scénarisé les aventures du comic Black Panther) au Théâtre Apollo de Harlem, Chadwid Boseman a déclaré :

« Je suis en réalité l’ennemi (…) C’est l’ennemi que j’ai toujours connu. C’est le pouvoir. C’est un privilège. » [1]

Il ira même jusqu’à décrire son personnage comme étant « né avec une cuillère de vibranium dans [la] bouche« . [2]

L’enfance d’Erik Killmonger, au contraire de celle de T’Challa, s’enracine dans la négrophobie structurelle rencontrée par la communauté noire en Occident, puisque ce Wakandais de la diaspora a grandi avec son père N’Jobu, à Oakland, au moment des émeutes de Los Angeles [3].

N’Jadaka ayant récupéré un masque traditionnel, sans doute pour exprimer que son identité n’est pas uniquement définie pas sa vie en Occident.

Chadwick Boseman a également déclaré que plusieurs éléments de la personnalité de Ryan Coogler se retrouvaient dans le personnage de Killmonger. L’auteur-réalisateur a énormément étudié pour le film, notamment en voyageant à Londres, pour visiter des expositions de musées africains, juste comme N’Jadaka Killmonger fait dans sa première scène du film.

La scène du musée nous a fait pensée à la bataille que livre le Bénin (ex royaume de Dahomey) pour récupérer ses artefacts pillés par la France durant la période coloniale.

Killmonger et T’Challa sont simultanément des héros et des méchants. Mais Chadwick Boseman admet tout de même avoir davantage de sympathie pour l’adversaire de son personnage du fait de sa proximité avec les Africains-américains :

« Je ne sais pas si nous autres Afro-Américains, accepterons T’Challa comme notre héros s’il ne passait pas par Killmonger, parce que Killmonger a traversé notre lutte, et [pas T’Challa] ». [4]

Bon, vous l’aurez compris, il s’agit là d’une interprétation politique du film et il existe de nombreuses manières de comprendre et de le ressentir.

Mais vous les Nofistes,  #TeamT’Challa ou #TeamKillmonger ?!

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Notes et références

[1] « 10 Things We Learned at Ta-Nehisi Coates’ ‘Black Panther’ Cast Talk« , rollingstone.com, publié le 28 février 2018

[2] « What Chadwick Boseman and Lupita Nyong’o Learned About Wakanda« , theatlantic.com, publié le 28 février 2018

[3] Des émeutes qui ont éclaté le , après qu’un jury n’ait acquitté quatre policiers malgré leur usage excessif de la force lors de l’arrestation et du tristement célèbre passage à tabac de Rodney King. Les Rodney King riots se sont propagées dans toute la région, notamment à Oakland.

[4]