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Construction du premier centre de fertilité public d’Afrique subsaharienne

Société

Construction du premier centre de fertilité public d’Afrique subsaharienne

Par Sandro CAPO CHICHI 6 octobre 2017

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L’Ouganda a annoncé la construction  sur son territoire le premier centre public de fertilité d’Afrique sub-saharienne. Il sera destiné à réduire le coût des traitements contre l’infertilité que la grande majorité des Ougandais ne peuvent s’offrir.

Par Sandro CAPO CHICHI / nofi.fr

GPA, PMA, etc.

La procréation médicalement assistée est une aide médicale accordée à une femme ou à un couple ne parvenant pas à avoir d’enfants. La fécondation in vitro et l’insémination artificielle en constituent deux des formes.

Dans une interview accordée à nos confrères du Figaro, le cardinal français André Vingt-Trois exprimait sa crainte à propos l’extension probable de la procréation médicalement assistée (PMA) aux mères célibataires et aux couples de lesbiennes. Cette extension de la pratique a fait grincer des dents dans les milieux conservateurs, comme par exemple parmi les militants de la Manif’ Pour Tous. Ces derniers, par le biais de leur présidente, regrettaient que l’on accorde un soutien médical à des femmes sans conjoint. La réaction négative de Vingt-Trois n’est selon lui pas le fait d’ une quelconque hostilité face au fait que des couples de femmes puissent légalement être aidés à avoir des enfants. Il craint plutôt que le droit à l’aide à la procréation pour les couples homosexuels féminins entraîne des revendications de droits identiques de la part de couples homosexuels masculins. Et comme un homme ne peut pas accoucher, obtenir le droit d’avoir des enfants par procréation passera nécessairement par  la gestation pour autrui (GPA). Celle-ci n’est possible que par le ventre d’une mère porteuse et le cardinal Vingt-Trois craint qu’à terme, que la GPA entraîne une sorte de business des mères porteuses.

L’Ouganda, site du premier centre de fertilité public d’Afrique subsaharienne

En Ouganda, la situation est différente. L’homosexualité est interdite par la loi. Le pays avait même failli faire passer une loi criminalisant durement ces pratiques fin 2013 avant de l’annuler, sous la pression occidentale, début 2014. La question de l’extension de la GPA à des couples homosexuels ne se pose donc même pas à court ou à moyen terme en Ouganda.

La question de la PMA est toutefois d’actualité. 2018 est en effet l’année de l’ouverture du premier centre de fertilité public en Ouganda. Situé dans le nouveau Women Maternal Hospital à Kampala dans la capitale du pays, il s’agit du premier établissement de ce type en Afrique sub-saharienne. Comme on peut l’imaginer, en Ouganda, l’urgence de la généralisation de la PMA n’est pas associée aux droits des homosexuels comme en France,  mais aux importants problèmes d’infertilité qu’y connaissent les femmes. En premier lieu, l’Ouganda fait partie de l’Infertility Belt, une zone géographique s’étendant de la Kenya à l’est jusqu’au Nigéria à l’ouest et caractérisée par son taux très élevé d’infertilité.

fertilité

Différences entre les taux d’infertilité secondaires (qui se produisent après un premier accouchement) et primaires, selon Abate, Yilbeltal & Ahmed / ‘Synthesis on infertility and sexual dysfunction’

Typiquement, celle-ci peut être causée par des infections sexuellement transmissibles et par des interruptions volontaires de grossesse réalisées dans des conditions peu hygiéniques.

Outre le degré important d’infertilité qui les frappe, les femmes ougandaises sont confrontées à la double stigmatisation sociale qui marque cette condition. Non seulement dans bien des régions du pays, une femme n’est acceptée socialement que si elle donne un enfant, mais en plus, lorsqu’un couple est infertile, la femme est souvent considérée comme la source du problème.

Quand la femme est reconnue comme la ressource de l’infertilité du couple, et que l’époux peut avoir plusieurs femmes, celui-ci peut ne pas se préoccuper d’une épouse infertile, sachant qu’il peut avoir des enfants par d’autres de ses femmes.

Atteinte d’hyper-ovulation, Mariam Nabatanzi Babirye a accouché de 44 enfants depuis ses 13 ans

Dans de nombreux cas évidemment, des couples composés d’un homme et une femme et ne pouvant pas concevoir souffrent ensemble.

La seule alternative pour ces femmes et couples avant l’ouverture du premier centre public de fertilité en 2018 était de payer une somme environnant les 3400 dollars US. Grâce au centre, financé par la Fondation Merck, le prix d’une fécondation in vitro sera du prix somme toute plus abordable de 972 dollars. Une somme qui dans un pays où le salaire moyen mensuel est d’environ 56 dollars pourra sembler considérable, mais qui ne paraîtra sans doute que peu à ceux à qui elle permettra de renaître en donnant la vie.