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Julian Abele, l’architecte noir concepteur de certains grands monuments US

Culture

Julian Abele, l’architecte noir concepteur de certains grands monuments US

Par Sandro CAPO CHICHI 23 septembre 2017

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Julian Abele (1880-1951) est un architecte afro-américain. Il a conçu les plans de certains des plus fameux bâtiments américains.

Par Sandro CAPO CHICHI / nofi.fr

Pour bien des observateurs, l’architecture apparaît comme moins rattachable aux architectes que les sculptures ne le sont aux sculpteurs et les peintures aux peintres. La raison est peut-être que contrairement à de nombreuses peintures ou sculptures, la réalisation physique d’un édifice n’est pas accomplie par les architectes eux-mêmes mais par des sous-traitants. Résultat, les édifices sont plus souvent rattachés à une culture et à une époque qu’à une personne. L’architecture dans l’Amérique du début du vingtième siècle étant une discipline largement réservée aux Blancs, on est naturellement tenté de ne pas soupçonner l’influence créative d’un Noir dans les édifices construits durant cette époque. Si l’on ajoute à cela la personnalité effacée de Julian Abele et sa volonté de signer ses oeuvres du nom de la société qui l’employait, le grand public ignore souvent la contribution de ce brillant Afro-Américain à l’architecture de son pays.

Né en 1881 dans une famille noire aristocrate de Philadelphie, Julian Abele bénéficie d’une éducation privilégiée au cours de laquelle il se distingue. En 1901, il faisait partie de la liste des architectes certifiés la ville de Philadelphie. Un an plus tard, à l’âge de 21 ans, il devient le premier architecte noir diplômé de l’Université de Pennsylvanie.

Julian Abele

Les trois années suivantes le verront parfaire sa formation à l’étranger en Europe, notamment en France où il aurait assisté aux cours de l’Ecole des Beaux Arts de Paris.

Julian Abele

Croquis d’Abele représentant une maison de style gothique à Tours, France

La France aura une forte influence sur son oeuvre et sur sa vie personnelle : Abele épousera en 1925, une Française, Marguerite Bulle avec qui il aura trois enfants.

En 1906, lors de son retour d’Europe, Abele commence à travailler pour la société d’Horace Trumbauer qui s’occupe de construire des résidences pour les industriels et entrepreneurs. Il en devient le designer en chef en 1909.

C’est avec cette société qu’ Abele mènera l’ensemble de sa riche carrière professionnelle contribuant dans ce cadre à plusieurs centaines de projets. Parmi ceux-ci, on compte de nombreux monuments prestigieux comme la bibliothèque libre de Philadelphie et le Musée d’Art de cette ville. La conception des marches de ce dernier, popularisées par le film Rocky, est notamment à mettre au crédit d’Abele.

Julian Abele

Les ‘marches de Rocky’ à Philadelphie

Pour ce travail inspiré de l’architecture de la Grèce Antique, Abele a voyagé en Grèce afin d’y étudier les ruines sur place.

L’architecture de la Bibliothèque est quant à elle inspirée par celle de la France, dont on a déjà évoqué l’influence sur l’oeuvre d’Abele.

Julian Abele

Dessin de la Free Library de Philadelphie par Julian Abele

L’inspiration pour ce monument lui est venu de l’architecture parisienne du 18ème siècle, précisément des façades facades du Ministère de la Marine et de l’Hôtel de Crillon sur la Place de la Concorde à Paris.

Julian Abele

Le campus de Duke conçu par Julian Abele récemment renommé Abele Quad en son honneur

Mais l’oeuvre la plus emblématique de Julian Abele est probablement la conception du campus de la prestigieuse université de Duke mobilisant notamment des influences gothiques. Cette université, l’une des plus prestigieuses du sud des Etats-Unis et du pays entier était réservée aux Blancs jusqu’en 1961. Selon la légende, Abele, décédé en 1950, n’aurait pu visiter le campus qu’il avait conçu en raison des lois de ségrégation en vigueur dans le sud des Etats-Unis. Pendant les décennies suivant la mort de Julian Abele, la poussière allait recouvrir la paternité de cet artiste noir sur son oeuvre jugée blanche et rejoindre le patrimoine d’une ‘haute culture’ américaine du début du 20ème siècle plus diverse que l’uniformité de la couleur de ses murs ne pourrait le laisser penser.

Julian Abele

Julian Abele (1881-1950)

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Pour en savoir plus (en anglais):

http://www.archives.upenn.edu/people/1800s/abele_julian_fra_wm.html

http://www.smithsonianmag.com/history/out-of-the-shadows-85569503/