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Pourquoi est-il facile de se faire tuer par la police américaine quand on est noir

Société

Pourquoi est-il facile de se faire tuer par la police américaine quand on est noir

Par Naya 1 décembre 2014

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Pas un seul jour ne passe sans qu’on entende une histoire de jeune noir abattu par la police américaine. Des affaires toujours avec le même contexte, les mêmes protestations et manifestations de colère, le même discours de soutien de Barack Obama qui se répètent depuis des années et qui ont toujours le même dénouement : l’acquittement du meurtrier. Pourquoi assassiner un noir semble facile et sans conséquences pour les policiers blancs ?

En tentant de trouver des informations sur la mort de Tamir Rice, jeune noir de 12 ans abattu par un policier ce 22 novembre, je me suis rendue compte que les mêmes affaires se suivaient… Et se ressemblaient ! Je devais vérifier à deux fois mes informations, pour ne pas confondre une affaire de noir tué par un policier avec une autre. Ces dernières années on compte bien une dizaine de cas de noirs abattus en pleine rue par des policiers blancs (sans compter les affaires non médiatisées en France). Les américains ont beau relayer l’information, dénoncer les coupables, manifester, être invités par Barack Obama, avoir le soutien des plus grandes stars mondiales, rien ne change et le constat reste le même : le policier est acquitté. Cela peut sembler choquant, non… Cela est bel est bien choquant, immoral et injuste, mais cela n’est dû qu’à un mécanisme judiciaire bien rodé et qui vise à favoriser l’agresseur au détriment de l’agressé.

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On se souvient de Trayvon Martin en 2012, parti s’acheter des bonbons à l’épicerie du coin et abattu d’un coup de feu dans la poitrine par George Zimmerman. L’homme fut acquitté quelques temps après, provoquant l’indignation de la communauté noire. Ce cas a montré qu’aux États-Unis il est facile même pour un homme de se substituer aux forces de l’ordre et d’abattre un adolescent en pleine rue sans avoir a en payer le prix. Barack Obama fera part de son soutien envers la famille de la victime en déclarant :

Si j’avais un fils, il ressemblerait à Trayvon Martin.

489524-mort-trayvon-martin-17-ansA la suite de cette affaire, on peut se poser des questions, se demander comment il est possible qu’un homme assassine un jeune adolescent de 17 ans sans aucunes répercussions. La chose à savoir est que la législation américaine est très différente des lois françaises. Zimmerman ne doit sa liberté qu’à une loi très controversée aux États-Unis et adoptée en 2005 par l’ancien gouverneur de Floride, Jeb Bush. La loi « Stand your ground » (« protégez votre territoire » en français) spécifie qu’une personne qui utilise son arme en cas d’intrusion sur sa propriété ou de menace potentielle à sa survie, peu importe l’endroit, n’aura pas à en répondre devant la justice. Les américains n’ont donc pas les mêmes rapports aux armes à feu que nous. Les lois américaines ont tendance à privilégier la personne armée au détriment de la victime. Pour comprendre cela il est nécessaire de revenir un peu plus tôt dans l’histoire, et de s’intéresser à comment les États-Unis ont bâti tout un système de protection par les armes afin de rassurer une population qui se sentait en danger. Dans cet extrait du film documentaire Bowling for Columbine de Michael Moore, on comprend facilement la relation que les américains entretiennent avec les armes à feu. C’est à travers une satire pleine d’humour que le réalisateur explique comment les américains blancs ont construit leur propre peur des noirs et comment l’Amérique tend à préserver un climat raciste incitant la peur de l’autre en permanence :

Ces derniers jours, deux affaires de noirs tués par des policiers américains font les gros titres. En plus de la vidéo du meurtre de Tamir Rice qui circule sur la toile et qui indigne l’Amérique, la démission de Darren Wilson, policier ayant assassiné le jeune Michael Brown de six coups de feu l’été dernier, fait la une des journaux. Darren Wilson avait lui aussi été acquitté, et avait déclaré ne rien regretter de ses actes. Malgré le fait que ces affaires soient largement relayées et, la plupart du temps, dénoncées par les médias, les choses ne semblent pas changer aux États-Unis. Aujourd’hui, un policier américain se dira que s’il assassine un noir, il n’aura rien à craindre de la justice grâce à la toute-puissance de la loi invoquant la légitime défense. Ce constat est très alarmant et inquiétant pour les afro-américains qu’on accuse d’être la source du climat d’insécurité mais qui en réalité subissent ce climat de plein fouet. En juillet dernier une interpellation de police sur Éric Garner, un père de famille de 43 ans avait viré au drame. La vidéo de cette intervention musclée des forces de police avait fait le tour du monde. On voit plusieurs policiers mettre Garner à terre, lui, suffoquant et implorant les policiers de le lâcher, en vain. L’homme décèdera sous le regard des passants, étouffé par la prise des policiers.

https://www.youtube.com/watch?v=Kg9WO2kcpig#t=107

Par constat de ces différentes affaires, il parait simple de se faire tuer par la police quand on est noir aux États-Unis. Est-ce que cela peut changer ? Je ne crois pas. Les lois américaines concernant les armes et la légitime défense semblent inaliénables. De nombreux militants s’indignent et protestent contre les méthodes employées par la NRA (National Rifle Association) qui a pour but de promouvoir les armes à feu aux États-Unis et de défendre leur libre commerce et leur promotion à travers le pays. Cause perdue lorsqu’on sait que cette association est aujourd’hui l’un des piliers fondateurs du pays. Il est important de souligner que même si les actes racistes et les discriminations raciales envers les noirs américains sont censés appartenir à un passé révolu, ce racisme se traduit aujourd’hui par la toute-puissance des forces de police américaines envers les noirs, leur droit de vie et de mort envers la population noire, et ce, sans aucunes conséquences. Le rêve américain ne semble plus être d’actualité (ou ne jamais l’avoir été) pour les noirs dans « le pays des droits de l’homme blanc ».