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Quel est le but de la vie dans les traditions africaines?

Culture

Quel est le but de la vie dans les traditions africaines?

Par Sandro CAPO CHICHI 24 juin 2019

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Quel est le but de la vie dans les traditions africaines ? Comment réussir sa vie selon ces traditions ? Réponse dans cet article.

Par Sandro CAPO CHICHI / nofi.media

Pourquoi ‘les Africains’ font-ils beaucoup d’enfants ?

Les non-Africains pointent souvent du doigt la tendance des Africains à faire beaucoup d’enfants.  Dans nombre de cultures africaines, avoir des enfants est effectivement important. Mais pas pour les raisons que beaucoup soupçonnent.

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Le fait d’avoir beaucoup d’enfants est lié au but de la vie dans ces cultures. Ce but est de devenir un ancêtre.

C’est quoi un ancêtre?

Un ancêtre, c’est quelqu’un dont on perpétue le souvenir longtemps après sa mort. D’où l’importance, pour beaucoup d’Africains, d’avoir des enfants. Ceux-ci, à cause de l’amour filial, sont les plus susceptibles d’honorer leurs parents après leur mort.

Devenir un ancêtre et le rester dépend en grande partie du nombre de personnes qui permettront de l’honorer après sa mort. D’où l’importance, historiquement, pour nombre d’Africains, d’avoir beaucoup d’enfants.

Une façon plus efficace encore d’atteindre le statut d’ancêtre l’est par ses accomplissements dans sa vie.  Plus notre vie aura été utile aux autres, plus de personnes hors de notre famille auront de chances de perpétuer notre souvenir et de faire de nous un ancêtre.

Non, respecter des règles de morale n’est pas le seul moyen de devenir un ancêtre

Les personnes honorées longtemps après leur mort le sont pour plusieurs raisons.

On présente souvent des règles de morale à respecter pour vivre après la mort. Souvent similaires d’une culture à l’autre, ces règles sont des idéaux de morale comme « Ne tue pas, ne mens pas, ne vole pas, ne sois pas vaniteux, etc. »

Ces règles sont souvent énoncées pour préserver l’équilibre de la communauté. Que se passerait-il en effet si chacun se mettait à vexer voler, tuer ou à tromper son voisin? La société serait en état permanent de conflit, de déséquilibre.

Pour maintenir l’équilibre de la société, on donne donc ses consignes à ses membres leur garantissant ce que beaucoup espèrent le plus: une vie après la mort.

Violer ces règles peut effectivement froisser l’ego des membres de votre société. Si c’est le cas, ceux-ci auront plus tendance à freiner la reconnaissance de vos accomplissements.

Cela n’empêchera toutefois pas que l’on vous honore, si votre contribution est vraiment importante et a fortiori si elle s’adresse aussi aux membres d’autres sociétés.

Quelques exemples de grands ancêtres transgressifs

En réalité, nombre d’ancêtres étaient des personnalités transgressives dans leurs sociétés respectives.

Shango, le quatrième roi d’Oyo aurait ainsi été un tyran impulsif, voire sanguinaire. Ces attributs sont contraires à l’éthique yoruba. Cela ne l’a pas empêché de devenir l’un des ancêtres les plus honorés du monde afro-descendant.

la vie

‘Shango’
Crédit : David Zerca

C’est aussi le cas de Soundjata Kéïta, le fondateur de l’empire de Mali, qui durant sa jeunesse était un voleur et un glouton, des caractéristiques allant contre la morale des sociétés mandingues.

De même, Osei Tutu, le fondateur de la confédération Ashanti, aurait commis le crime d’avoir eu des relations sexuelles avec une reine, la décapitant et volant son or avant de fuir pour survivre.

Pourtant, ces trois personnages ont délivré leur communauté d’un grand mal. Par exemple, Soundjata Kéïta, le fondateur de l’empire de Mali, a enlevé une énorme épine du pied du peuple mandingue en le délivrant de la servitude de l’empereur de Sosso.

De même, Shango a libéré Oyo de la domination de l’état d’Owu. Osei Tutu, a quant à lui dirigé la victoire contre l’état oppressif de Denkyira.

C’est leur immense legs à leurs sociétés qui leur a permis d’être honorés après leur mort. Ce n’est pas leur respect de règles de morale.

Un but égoïste?

On peut se demander si la volonté d’être reconnu et de briller n’est pas un comportement égoïste et indigne. Nombre de  sociétés africaines voient en effet très mal la vanité et l’arrogance. Certaines personnes sont ainsi mal à l’aise à l’idée de se mettre en avant. D’autres non. Pour les premiers, il est toujours possible d’atteindre le statut d’ancêtre. Beaucoup l’atteignent souvent de manière anonyme en étant honorés à côté d’un héros culturel.

Le héros culturel

Le héros culturel est un personnage d’une culture ou d’une civilisation auquel on attribue des accomplissements fondamentaux pour l’existence et le maintien de la culture en question. Souvent, une partie des accomplissements qu’on leur attribue est due à d’autres personnes devenues ou restées anonymes.

Les héros culturels sont souvent des souverains. Combien de fois entend-on qu’un roi a conquis tel territoire ou bâti tel magnifique édifice? Souvent, le roi n’est ni un général, ni un architecte. Pourtant, on associe son seul nom aux accomplissements de son règne. Une raison est que ses sujets acceptaient parfaitement l’autorité de leur roi. Ils acceptaient le fait de s’effacer derrière lui comme symbole de leur nation, de leur patriotisme, de leur cause.

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Le dieu Osiris était considéré par les Egyptiens anciens comme un pharaon ayant appris à ses sujets l’agriculture, la pêche et la religion avant d’être divinisé. Il est un exemple de héros culturel personnifiant probablement le règne de plusieurs souverains et les apports au monde de ses sujets.

Devenir un ancêtre peut aussi passer par là : être honoré par un personnage qui symbolise nos actions et celles d’autres, notre nation ou notre cause commune. Parfois, ce héros culturel n’est même pas connu par son vrai nom ou par sa vraie apparence. De cette manière, il peut représenter l’abstraction de plusieurs personnes.

Vous pouvez ou non être prêt à assumer le fait d’être reconnu. Le but de votre vie, dans une perspective africaine, sera d’accomplir des choses dans votre vie. Celles-ci continueront d’inspirer les autres après votre mort.

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