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Quand Pierre Messmer justifiait la colonisation de la Kanaky

Histoire

Quand Pierre Messmer justifiait la colonisation de la Kanaky

Par Mathieu N'DIAYE 5 novembre 2018

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Nofi vous propose la retranscription d’une lettre de l’ancien Premier ministre Pierre Messmer à Xavier Deniau. Dans celle-ci, il justifiait la colonisation de peuplement de la Nouvelle-Calédonie. Cette lettre donne une clé de compréhension quant aux résultats du référendum sur l’indépendance de la Nouvelle-Calédonie.

Quand Pierre Messmer justifiait la colonisation de la Kanaky

Les électeurs de Kanaky [Nouvelle-Calédonie, NDLR] répondaient, le 4 novembre 2018, par la voie des urnes à la question « Voulez-vous que la Nouvelle-Calédonie accède à la pleine souveraineté et devienne indépendante ? ». Ces derniers ont répondu non à 56,4 %, laissant ainsi cet ensemble d’îles et d’archipels d’Océanie sous le giron français. Pour comprendre comment ce résultat a pu advenir, nous vous proposons de faire un rapide retour dans le temps. A une époque où les Kanaks, qui peuplent cet archipel depuis près de 5 000 ans, étaient vus par la puissance coloniale française comme des moins que rien.

En effet, le 19 juillet 1972, Pierre Messmer alors Premier ministre de Georges Pompidou, écrivait à son secrétaire d’État aux DOM-TOM, Xavier Deniau. Dans cette lettre, il encourageait la colonisation de la Nouvelle-Calédonie justifiant par la même occasion l’apartheid, le racisme, la spoliation, le pillage, la répression, les exactions et les assassinats…

La lettre de Pierre Messmer

« La Nouvelle-Calédonie, colonie de peuplement, bien que vouée à la bigarrure multiraciale, est probablement le dernier territoire tropical non indépendant au monde où un pays développé puisse faire émigrer ses ressortissants.

Il faut donc saisir cette chance ultime de créer un pays francophone supplémentaire. La présence française en Calédonie ne peut être menacée, sauf guerre mondiale, que par une revendication nationaliste des populations autochtones appuyées par quelques alliés éventuels dans d’autres communautés ethniques venant du Pacifique.

À court et moyen terme, l’immigration massive de citoyens français métropolitains ou originaires des départements d’outre-mer (Réunion) devrait permettre d’éviter ce danger en maintenant et en améliorant le rapport numérique des communautés.

À long terme, la revendication nationaliste autochtone ne sera évitée que si les communautés non originaires du Pacifique représentent une masse démographique majoritaire. Il va de soi qu’on n’obtiendra aucun effet démographique à long terme sans immigration systématique de femmes et d’enfants.

Afin de corriger le déséquilibre des sexes dans la population non autochtone, il conviendrait sans doute de faire réserver des emplois aux immigrants dans les entreprises privées. Le principe idéal serait que tout emploi pouvant être occupé par une femme soit réservé aux femmes (secrétariat, commerce, mécanographie).

Sans qu’il soit besoin de textes, l’administration peut y veiller.

Les conditions sont réunies pour que la Calédonie soit dans vingt ans un petit territoire français prospère comparable au Luxembourg et représentant évidemment, dans le vide du Pacifique, bien plus que le Luxembourg en Europe.

Le succès de cette entreprise indispensable au maintien de positions françaises à l’est de Suez dépend, entre autres conditions, de notre aptitude à réussir enfin, après tant d’échecs dans notre Histoire, une opération de peuplement outre-mer. »

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Notes et références

Lettre citée dans le livre de Claude Gabriel et Vincent Kermel « Nouvelle-Calédonie La révolte kanake« , La Brèche, publié en 1985.