Par Enzo Petteng. Des salles de boxe vétustes de Douala à l’octogone de l’UFC (Ultimate Fighting Championship), le combattant camerounais Francis Ngannou est devenu en un court laps de temps une star montante du MMA (Mixed Martials Arts). Francis Ngannou est aujourd’hui considéré par beaucoup d’observateurs comme celui en passe de devenir le prochain champion du monde poids lourd de l’UFC. Son combat du 2 décembre prochain confirmera ou infirmera ces pronostics. Portrait d’un lion indomptable…en cage.
Francis Ngannou, 31 ans, 1m92 pour 100 kg, sera peut-être le prochain champion en titre de l’UFC. S’il sortait vainqueur de la rencontre avec le néerlandais Allistair Overeem le 2 décembre prochain à Detroit (Etats-Unis), il deviendrait alors le premier africain à prétendre au titre en affrontant l’actuel champion. L’occasion de de présenter ce combattant camerounais au destin inattendu.
De Atch a l’UFC
Si l’entraînement est autorisé, les compétitions de MMA, elles, sont interdites en France. Pour contourner cette interdiction, les combattants français s’affrontent selon les règles du pancrace, une discipline proche du MMA à la différence que les frappes au sol et le ring fermé (la cage), propres au MMA, sont proscrits. Francis Ngannou a donc fait ses armes dans cette discipline, chez le promoteur le plus en vue de l’hexagone, Sébastien Atch, à l’origine des évènements « 100% fight », le 30 novembre 2013. Ce jour-là, Francis fait forte impression en soumettant son adversaire lors du premier round.
Deux semaines plus tard, le 14 décembre de la même année, il s’incline face à a son adversaire du soir, Zoumana Cissé, à la décision unanime du jury. C’est à ce jour son unique défaite et la seule fois où il n’a pas finalisé un combat avant la limite. La suite ne sera qu’une succession de victoires par K.O ou par soumission.
Après son premier combat en « véritable » MMA dans la cage du SHC à Genève (remporté par soumission sur le suisse Luc Ngeleka dans le premier round) le 10 septembre 2014, Francis Ngannou connu une période de vaches maigres: la catégorie des Poids Lourd comptant moins d’adversaires que les autres, les combattants pesant plus de 100 kilos combattent en temps normal moins que leurs homologues plus légers. Dans le cas de Ngannou, le ralentissement des combats tenait aussi et surtout du fait qu’aucun adversaire en France ne se sente capable de l’affronter.
Finalement, un an après son combat au SHC, le camerounais combat de nouveau, au Royaume du Bahrein, face à un brésilien du nom de William Baldutti. Un combat expéditif puisqu’il se débarrassera du brésilien en un seul round. Malheureusement, bien qu’il fasse l’unanimité auprès de ces pairs, l’organisation américaine qui réunit les meilleur combattants au monde, ne s’intéresse pas au combattant qui compte 3 combats de pancrace et 2 de MMA. Pour eux, il est encore trop tôt, il manque d’expérience, ils préfèrent attendre. C’était sans compter sur l’obstination de son coach, Fernand Lopez Owonyebe qui croit en lui, et en sa capacité de faire trembler la hiérarchie. Fernand Lopez ne lâche rien, insiste, les relance et obtient gain de cause, La Big League cède et propose un contrat de 4 combats à ce colosse africain que plus personne en Europe ne souhaite l’affronter. La Big League l’enverra dans la cage le 19 décembre 2015, deux ans seulement après son arrivée. Francis Ngannou détruira chaque adversaire que l’organisation mettra face à lui et s’offrira même la tête d’un ancien champion du monde de poids lourd de l’UFC, le biélorusse Andrei Arlovski. Par cette victoire, le camerounais envoie ainsi un message fort aux autres combattants de sa catégorie et s’impose à nouveau comme un redoutable lutteur.
Vie au Cameroun
Issu d’une famille pauvre, Francis Ngannou grandit à Batié, dans la région de l’Ouest du Cameroun, en pays Bamiléké. Enfant, il souhaite devenir avocat ou architecte. Cependant, pour des raisons alimentaires il est contraint de quitter les bancs de l’école à 12 ans et de travailler comme ouvrier dans une carrière de sable. Un avenir difficile et monotone se dessine alors pour le jeune homme.
Toutefois, rêveur et ambitieux, il décide quelques années plus tard d’aller chercher son bonheur dans la grande ville et quitte alors son village pour Douala. Là-bas, il charge et décharge les camions sur les marchés. C’est pour s’occuper lors de son temps libre qu’il décide de réaliser un vieux rêve, celui de boxer, sans imaginer un seul instant jusqu’où cela le conduira. Contre l’avis de son entourage, qui le croit devenu fou, Ngannou, devenu jeune homme, enfile pour la première fois des gants de boxe. Il débute néanmoins avec un handicap non négligeable: à 22 ans, il est poids lourd totalement inexpérimenté. Novice et plus lent que ses partenaires, Francis encaisse les coups sans jamais pouvoir en placer un seul. Pourtant, loin de se décourager et à force de travail et de persévérance, le natif de Batié progresse et décroche un premier combat, qu’il gagnera sur arrêt de l’arbitre. Il perçoit cette première victoire comme un déclic. Ngannou décide alors qu’il veut être boxeur, faire carrière et marcher sur les pas de son idole, Mike Tyson. Le débutant sait toutefois que pour vivre de son art, il devra quitter le Cameroun et tenter sa chance ailleurs.
Arrivée en Europe
Francis débarque alors en France, des rêves de boxe anglaise pleins la tête. C’est en se promenant dans le 12ème arrondissement de Paris qu’il tombe par hasard sur une salle de sport nouvellement ouverte : le Crossfight (rebaptisée MMA Factory depuis). Son amour pour le noble art le pousse à franchir les portes de cette nouvelle salle où l’on s’entraîne en MMA, sport qui lui est alors totalement inconnu et dans lequel il accepte pourtant de faire un essai, après négociation avec le maître des lieux, Fernand Lopez . La tentative s’avérera concluante puisque Francis Ngannou décide finalement de se consacrer au MMA. C’est au sein de cette même salle, située près de la porte dorée, que The Predator (son surnom dans le milieu) choisit de s’entraîner avec d’autres prodiges du MMA dont quelques combattants africains qui s’étaient illustrés auparavant dans les arts martiaux mixtes. C’est le cas par exemple de l’ancien champion du Bellator, le congolais Christian M’pumbu ou du vétéran du Pride, le camerounais Thierry Soukoudjou.
Si M’pumbu et Soukoudjou sont en fin de carrière, Ngannou lui est lancé à vitesse Grand V vers les sommets du sport de combats le plus complet. Afin d’optimiser ses chances de devenir le meilleur combattant au monde, le camerounais a récemment (re)fait ses valises et s’est exilé a la « Mecque » du fight, Las Vegas. On espère pour lui que ce choix sera payant et lui permettra de réaliser ses rêves de combattant, lui qui n’oublie jamais d’où il vient. En effet, à chacune de ses entrées dans la cage, il arbore fièrement le drapeau camerounais.
Le 2 décembre, s’il ressort vainqueur du face-à-face, Francis Ngannou aura l’honneur de combattre pour la ceinture la plus convoitée de la discipline contre l’actuel champion de l’UFC. Il deviendrait ainsi le premier africain champion de l’Ultimate Fighting Championship.
Par Enzo Petteng.
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