Neïba

Miss Brésil est une femme noire pour la deuxième fois consécutive et pour la troisième fois de l’histoire

Société

Miss Brésil est une femme noire pour la deuxième fois consécutive et pour la troisième fois de l’histoire

Par Sandro CAPO CHICHI 24 août 2017

Pour ne rien manquer de l'actualité,
téléchargez l'application depuis ce lien
Recevez du contenu exclusif, de l'actualité, des codes promos Nofi Store ainsi que notre actualité évenementielle chaque week-end !

Monalysa Alcantara, représentante de l’état de Piaui a été sacrée Miss Brésil 2017. C’est la deuxième fois consécutive et la troisième fois de l’histoire qu’une femme noire reçoit cet honneur. 

Par Sandro CAPO CHICHI / nofi.fr

Les récentes éditions de l’élection Miss France ont laissé lieu à un véritable débat identitaire. Pour certains observateurs d’extrême-droite, les récentes élections de femmes noires comme plus ‘belles femmes de France’ seraient une illustration de la menace qui toucherait actuellement la survie de l’identité française blanche.

Si ces craintes peuvent apparaître quelque peu fondées aux plus naïfs en raison de la proportion largement majoritaire des Blancs en France, elles n’ont absolument aucune raison de l’être dans un pays comme le Brésil où deux Afro-Brésiliennes ont été élues Miss Brésil de manière consécutive.

Miss Brésil

Raissa Santana, Miss Brésil 2016

Dans un pays dont plus de la moitié de la population se déclare être afro-brésilienne, seulement trois femmes de cette catégorie ethnique ont été élues Miss Brésil en 62 éditions du concours.

Par là, il n’y a rien d’anormal à ce que deux femmes de la catégorie ethnique majoritaire du pays soient élues consécutivement plus belles femmes du pays sans que l’on vienne pleurer au ‘racisme inversé’ ou aux méfaits de la discrimination positive. Ce qui est plutôt anormal est de considérer qu’il a été légitime que pendant soixante ans, aucune femme de cette catégorie ethnique majoritaire ne soit célébrée. Au cours des dernières années, des Brésiliens ont réalisé dans quelle mascarade ils s’étaient trouvés autrefois en se considérant comme congénitalement laids. Ils ont réagi à cette incongruité en élisant deux femmes ressemblant à la majorité du peuple brésilien.

Miss Brésil

Monalysa Alcantara, Miss Brésil 2017

Le chapitre aurait pu être clos si des internautes n’avaient pas accompagné ce changement de leurs commentaires les plus ignorants.

Ainsi, pour une certaine Juliana Porto, qui a fermé son compte Twitter depuis, Monalysa Alcantara ne mériterait pas ce titre, car elle aurait un visage de ‘femme de chambre’ :

Miss Brésil

« Beurk!
Miss Piaui a un visage de femme de chambre, un visage banal, elle n’a rien à faire là. Désolée »

Ces propos sont inquiétants. Il ne m’apparaît pas scientifiquement justifiable de postuler que les femmes occupant la fonction de ‘femme de chambre’ naissent avec des visages plus laids que les autres.

Tout ce que l’on sait est que le Brésil possède le plus de domestiques au monde, que 65% de ces domestiques sont des femmes noires et qu’une femme noire sur cinq y occupe cette fonction.

On pourrait, en se faisant l’avocat du diable, penser que pour Juliana Porto, les femmes brésiliennes des classes moyennes et supérieures disposeraient de plus grands moyens financiers pour embellir leur apparence. Le problème est que lors du concours de Miss Brésil, les candidates sont présentées avec le même niveau d’apprêtement quelque soit leur milieu social.

En d’autres mots, le principal critère pour être considéré comme le plus beau visage féminin du pays par Juliana Porto est de ne pas avoir un emploi où les femmes noires sont sur-représentées.   De ces paroles au racisme, n’y aurait-il pas qu’un pas?

Miss Brésil

« Beurk!
Miss Piaui a un visage de femme de chambre, un visage banal, elle n’a rien à faire là. Désolée »

Lors de l’élection de Monalysa Alcantara, un des jurés a justifié son choix en déclarant qu’elle représentait la ‘brésilianité’. Il n’en a pas fallu plus à certains internautes pour se sentir fragilisés dans leur privilège, voire dans leur survie. Un certain Thiago Weingarten Couto a ainsi exprimé sa volonté de supporter Miss Argentine lors de l’élection de Miss Univers, Miss Brésil ne le représentant pas assez à son goût.

Miss Brésil

« [La première dauphine] n’avait pas ce qu’il fallait pour être élue Miss Brésil mais ce qui lui manquait n’était pas son manque d’éloquence mais son manque de ‘brasiliannité’. C’est quoi la brasiliannité? C’est ‘être noire’? Les Brésiliennes ‘caucasiennes’ ne sont pas Brésiliennes? Arrêtons OK. Je ne vais même pas attaquer la gloire imméritée de [Monalysa Alcantara], mais j’espère que Miss Argentine  me représente ra moi et les autres qui ne possèdent pas cette ‘brasilianité’. « 

A travers ce commentaire, on retrouve malheureusement l’expression de la fragilité du privilégié qui refuse d’admettre que le monde ne tourne pas autour de sa personne et n’a pas commencé avec sa naissance. Que chercher à rattraper les ravages de siècles de déséquilibre qui ont encore des conséquences néfastes sur beaucoup de personnes  n’est pas un crime. Noter qu’une Noire possède la Brésiliannité n’est pas nier qu’une Blanche la possède, mais de mettre l’emphase sur le fait qu’elle l’a possède aussi, malgré le fait qu’on la lui ait niée, avec son humanité, pendant des siècles.

La plus belle femme du Brésil, Monalysa Alcantara, l’a bien compris en déclarant : « J’espère aider les femmes noires à se sentir belles et montrer qu’elles sont capables de réaliser leurs rêves ».

Miss Brésil

Monalysa Alcantara