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Marie-Inès Romelle, une guadeloupéenne pionnière dans l’industrie du champagne

Economie

Marie-Inès Romelle, une guadeloupéenne pionnière dans l’industrie du champagne

Par SK 16 septembre 2016

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Vous ne connaissez pas encore les champagnes Marie-Césaire ? Il est temps de vous mettre à la page. Cette marque a été créée il y a deux ans par Maire-Inès Romelle, une femme ambitieuse et déterminée originaire de la Guadeloupe. Après avoir été en charge de l’épicerie fine dans les Dutty Free de Orly et officié dans la gestion de patrimoine pour une grande banque, la rémoise d’adoption a décidé de fonder une entreprise familiale autour d’un des produits les plus prestigieux : le champagne.

Rencontre avec une pionnière des grands crus.

Pourquoi avoir choisi le champagne comme projet d’entreprise ?

J’ai toujours adoré ça,  c’est un produit très noble, fort en caractère. Par ailleurs le champagne est l’un des vins les plus complexes à fabriquer et finalement, je n’aime pas  trop les choses simples. C’est aussi un choix par rapport à mes origines car on consomme beaucoup de champagne en Guadeloupe. Les Antillais sont troisièmes au rang mondial et ont longtemps été les premiers dans la consommation de champagne. Je connais donc ce produit depuis longtemps.

D’où vient le nom  Marie-Césaire ?

 

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Quand j’ai crée ce champagne, j’ai voulu rendre hommage à mes parents. Marie c’est le prénom de ma mère et Césaire celui de mon père.

Qui constitue l’équipe ?

Il y a d’abord le viticulteur, Christophe, basé à Ecueil (Marne), sur la petite montagne de Reims, qui est classée Premier Cru.  Je n’ai pas de vignes et pas non plus les accréditations nécessaires à la manipulation du champagne. Aussi, il me vend sa récolte et fait toute la fabrication, moi je lui indique le dosage en sucre. Ensuite, il y a mon conjoint, Thomas, qui s’occupe de toute la partie financière et mon frère Jaïro Romelle, qui lui s’occupe de la partie développement de la marque et événementiel. J’ai aussi la chance d’être entourée de deux bons stagiaires, Clément et Simon, qui s’occupent de la communication.

S’agit-il d’une entreprise familiale ?

Oui, le but est que plus tard mes fils travaillent avec moi. Mon aîné commence son apprentissage à mes côtés cette année. Il faut que ça reste en famille. C’est pour ça qu’il fait des études dans le secteur de la gestion d’entreprise, pour faire comme moi. Car,  si je dois m’absenter, j’ai besoin de quelqu’un de confiance pour me suppléer.

Quel est l’esprit de la marque Marie-Césaire ?

L’esprit est très tourné vers la culture antillaise, parce que le nom est Marie-Césaire, qui sont deux prénoms assez connus dans les îles. Ensuite, l’élaboration est faite à base de sucre de canne. Enfin, le logo, est constitué de deux colibris, et on sait très bien que le colibri est très marqué Antilles. Néanmoins, on n’a pas du tout fermé le marché aux Antillais exclusivement, tout le monde achète du Marie-Césaire.

En quoi votre champagne se démarque-t-il des autres ?

 

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Il est un peu plus sucré mais c’est assez subtile, seuls les palais aguerris peuvent sentir la différence. Mais il ne faut pas s’attendre à retrouver la même intensité de sucre à chaque fois. J’ai six champagnes qui sont tous dosés différemment. Le plus sucré c’est le rosé sec, à 22 grammes. J’ai aussi un millésimé qui sort bientôt et qui est beaucoup moins sucré. Les différents champagnes se marient à des repas et des occasions variées. Par exemple, pour les fruits de mer et la viande blanche, on conseille le « Blanc de Blancs ». Ils sont étudiés pour aller parfaitement avec les mets qu’ils accompagnent. C’est très important car, mal accordé, le goût du champagne peut être déprécié. Et les produits Marie-Césaire ne donnent pas mal à la tête, car ils sont réduits en sulfite.

Est-ce un marché difficile à pénétrer ?

Oui, il ne faut pas se leurrer. Quand on entre dans l’univers du champagne on a deux solutions : soit on n’y connaît rien et ça ne fonctionnera qu’un temps. Soit on veut durer dans ce milieu, et alors faut maîtriser toutes les informations sur le produit que l’on vend. J’invite d’ailleurs ceux qui veulent se lancer, par la suite, à bien connaître le marché parce que face aux viticulteurs et aux concurrents, il est toujours bon d’avoir une certaine légitimité. Surtout pour les clients, qui posent énormément de questions et à qui on ne peut pas mentir. Ils paient un certain prix donc ils doivent être satisfaits. En ce qui me concerne, j’espère que les gens apprécieront mon champagne à sa juste valeur.

Vous êtes la seule femme afro-caribéenne dans ce domaine, cela engendre-t-il des obstacles ?

Je suis super contente d’être la première noire caribéenne à m’être lancée parce que pour la communauté, pour les femmes, les femmes de banlieues, peu importe leur couleur je trouve ça bien de faire bouger les choses. Après, je ne me réveille pas le matin en me disant « Oh je suis noire ! ». Je ne me pose pas de questions en fait, je suis là dans un but bien précis, pérenniser ma société. C’est aux gens de voir, ils font du business avec moi sinon tant pis, je ferais affaire avec quelqu’un d’autre. En revanche, le soutien des personnes que je croise à Reims et qui me reconnaissent, les encouragements de mes clients, c’est ce qui me donne de la force parce que ce n’est pas facile tous les jours. Je ne peux pas imposer aux gens d’acheter mon champagne, mais je respecte déjà les gens qui mettent un j’aime, un petit commentaire ou envoient un message sur nos réseaux sociaux.

Dans quelle gamme de prix se trouvent les confections Marie-Césaire ?

On est dans du moyen de gamme, entre 23 et 38 euros pour l’instant. C’est très abordable, surtout pour du bon champagne. Pour l’instant, nous sommes distribués chez un seul caviste. Pour le reste tout part du cellier vers Reims. C’est notre choix. Par ailleurs, je ne  fais pas d’exportation actuellement parce que c’est très cher. J’espère qu’avant juillet 2017 j’arriverai à vendre en Guadeloupe, parce que je suis guadeloupéenne et que l’île est mon premier soutien.

Quelles sont les actualités de la marque ?

Ce que les ventes me rapportent je l’investis dans les événements. Nous ouvrons un show room à Reims d’ici peu. On va donc pouvoir recevoir décemment les gens qui nous soutiennent. Notre carnet de commande est quasiment plein jusqu’à la fin de l’année. Pour cette période, nous sortons justement une édition limitée qui sera un champagne plus sucré. C’est une demande qui nous est revenue souvent, notamment par nos clients antillais, car les palais antillais adorent le sucre. Cette édition a été spécialement crée pour eux. Toujours en fin d’année, nous présenterons le dessert « Marie-Césaire », créé par un grand chef cuisinier de Reims.

Un conseil pour les entrepreneurs qui aimeraient se lancer ?

Ne jamais oublier que ce sont les clients qui font vivre l’entreprise, et qu’il faut donc toujours être à leur écoute et les respecter. Lorsqu’on se lance, il faut vraiment le faire dans un domaine qu’on connaît parce que le banquier, les consommateurs vont vous questionner. Il ne faut pas se mettre en difficulté inutilement. Moi par exemple, j’ai repris mes études et obtenue cette année mon Master 2. C’était important parce que je n’y connaissais rien en administration des entreprises. Il faut aussi être persévérant et croire en soi parce qu’effectivement c’est vraiment dur, et il ne faut pas croire que ça va arriver du jour au lendemain. Mais tenez bon parce que ça viendra. Enfin, il faut être réaliste et avoir un peu d’argent de côté pour pouvoir démarrer car, normalement on ne se prend pas de salaire la première année.