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Neg marrons, Bilan de la carrière des intemporels du rap

Culture

Neg marrons, Bilan de la carrière des intemporels du rap

Par SK 3 mai 2016

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« Appelle-moi Neg Marrons mes ancêtres sont morts au combat ».Un groupe qui s’inscrit dans la durée, qui kick comme au premier jour, une valeur sûre ! C’est d’ailleurs le nom de leur dernier album, sorti le 8 avril 2016. Neg Marrons, une appellation lourde de sens portée par le duo dynamique aux lyrics affûtées. Calmement, faisons le bilan de la carrière des affranchis.

L’engagement comme gage de qualité

Le célèbre duo Jacky et Benji (Benjacky, Jackyji) « Jacky et Benji c’est la même cousin » (Dis-moi sis j’te soûle) est au départ trio. Des instrus dancehall et reggae, relevées par des textes rap engagés, c’est la formule miracle du groupe. Au départ trio*, ces jeunes originaires de Garges-Sarcelles arrivent sur la scène rap en 1995, déterminés à être les porte-voix d’une cause afro délaissé en France. Le Neg Marron est l’esclave qui s’affranchit, libéré de l’angoisse de la mort et de la punition du maître impitoyable. Le Neg Marron est celui qui n’est pas résigné et qui a pour seule trésor sa dignité. Le reggae, musique politique subversive par essence, accompagne des morceaux profonds et criant de vérité. Ce n’est donc pas un hasard si le premier album du groupe est intitulé Rue Case Nègres. Homonyme du célèbre film d’Euzhan Palcy, qui raconte l’esclavage et ses blessures dans les Antilles françaises. L’album est sacré disque d’or. Les jeunes loups deviennent logiquement fers de lance d’une révolution sociétale , qui n’attendait qu’une tempête pour éclater. Et la tempête s’abattit…

https://www.youtube.com/watch?v=AFXK03FCa14

Titre: La monnaie, sur la Bande Originale du film Raï, de Thomas Gilou, 1995

https://www.youtube.com/watch?v=fOmQtEFbdkQ

Clip: Le Bilan, album Le bilan, 2000

 

La cohérence, clé du succès

On ne peut pas se dire Neg Marron (Noir et Fier) et verser dans la facilité, l’appât du gain en tournant le dos à ses valeurs. Même si « c’est la Monnaie qui dirige la terre ». C’est d’ailleurs l’une des clés de la longévité des deux compères. Titre après titre, collaboration après collaboration, leur orientation n’a pas changée. Ainsi, fin des années 1990, « C’est boule de neige, premier album, studio, promo, clip vidéo » (Le bilan). Le duo fait le boulot, déjà fort de sa crédibilité au sein du Secteur Ä. Neg Marrons valorise l’Afrique et les Caraïbes, mettant au goût du jour la musique dans laquelle nous baignions enfants. A la fois frontalement (le nom) et subtilement (le son) les grands frères imposent un style particulier et, « Quitte à déranger , restent les mêmes, question d’intégrité »(Produit de son environnement). On est au début des années 2000, ils sont noirs, ils sont charismatiques et portent fièrement l’étendard de la jeunesse des quartiers cultivée, motivée, déterminée.

https://www.youtube.com/watch?v=79BQzsjlwlg

Clip: Produit de son environnement, album Héritage, 2003

Clip: Tout le monde debout, album Héritage, 2003

 

La niaque envers et contre tout

Le phénomène ne s’éteint pas, au contraire, au milieu des années 2000, les Neg Marrons sont plus forts que jamais. Sur toutes les antennes et scènes Hip-Hop de France, on les entend. C’est que le duo a des choses à dire et croit au credo « Faut qu’on fasse mieux » (Héritage). C’est aussi que le duo sait s’entourer. Continuer de faire et faire bien, percer et rester soi, c’est quand même plus facile  lorsqu’on peut participer à des projets comme Noyau Dur. En 2005, accompagnés du ghetto ambianceur Pitt Baccardi et des frères à la plume empoisonnée Ärsenik, ils nous livrent un album dans l’ère du temps. Un projet rapo-sensuelo-afro-coupé-décalo-class-swagg. Bref ! Une pure bombe. Pour le clip du titre phare de l’album, « Viens »,  les tireurs d’élite n’ont invité autre que celui qui fit le coupé décalé, le regretté Douk Saga, entouré de ses complices Boro Sanguy et Lino Versace. Le concept est fort, le clip est fort, l’ambiance est au maximum. Neg Marrons, c’est aussi ça , faire les chose au bon moment et marier judicieusement l’Afrique et l’urbain français. Tout simplement du génie !

Clip: Viens, album Noyau Dur, 2005

Clip: Dis-moi si j’te saoule, album Héritage, 2003

Les parrains de la culture

L’Afrique toujours en cœur et encore, en 1999, Benji participe au projet Bisso na Bisso, qui réunit les rappeurs d’origine congolaise de la scène rap (Passi, Mystik, Calbo et Lino (Ärsenik), Gkill et D.O.C (2Bal),M’passi (Melgroove). L’aventure s’arrête momentanément et reprend en 2009. En 2008, les  Neg Marrons  sortent le titre « Petites îles » avec la prêtresse regrettée Cesaria Evora (album Les liens sacrés, 2008). « Le temps passe et passe et passe et beaucoup de choses ont changé ». Pas eux. Hors des studios et des projecteurs, Jacky et Benji s’impliquent dans la culture. « Chaque jour est un freestyle faut être doué pour l’impro » (Donne-toi les moyens), ainsi le duo continue d’écrire son épopée en parrainant des projets de qualité. Récemment, Jacky était le jury de l’émission « Trace Music Star », émission conceptualisée par la chaîne et le magicien de l’ombre monsieur Dawala. Il a résucité la légendaire émission « Couvre-feu » sur OKLM  radio, média détenu par l’aigle noir du rap français, monsieur Booba. Benji, quant à lui, est le parrain du premier numéro du nouveau magazine d’histoire « Devoir de mémoire ». JackyJi n’a pas raccroché les gants et à chaque retour ils tapent juste. Un groupe culte, une référence, une valeur sûre.

Clip: Petites îles feat. Cesaria Evora, album Les liens sacrés, 2008

*Au début de l’aventure Neg Marrons, le groupe forme un trio avec Djamatik, qui quitte la machine pour une carrière solo en 1999.

https://www.youtube.com/watch?v=eRRaPYLTDD8

Djamatik, album Connections, 1999