Neïba

Max Limol : 30 ans de passion pour la sneaker

Société

Max Limol : 30 ans de passion pour la sneaker

Par SK 26 novembre 2015

Pour ne rien manquer de l'actualité,
téléchargez l'application depuis ce lien
Recevez du contenu exclusif, de l'actualité, des codes promos Nofi Store ainsi que notre actualité évenementielle chaque week-end !

« Il ne suffit pas d’avoir une belle paire, il faut surtout l’incarner. »

Max Limol est l’auteur de Culture Sneakers : 100 baskets mythiques. Après la création du site Sneakers-culture.com dédié aux univers de la basket, il nous livre l’ode d’un amoureux de la culture sneaker à cette basket, qu’il érige en témoin de l’histoire. Ces accessoires qui habillent nos pieds sont encrés dans une époque, entretiennent d’étroites relations avec la musique, la mode et le cinéma. Max Limol a vécu au cœur du temple de la basket, entre New York et Boston, où sa passion s’est transformée en expérience et même en science. Les amoureux des baskets savent-ils quel héritage ils traînent sur les pavés parisiens ? Le livre recèle d’anecdotes inattendues sur l’identité secrète de ces legs du temps.

Découvrez le parcours d’un expert en la matière et prenez un cours de « baskets ».

Comment naît le projet du livre ?

C’est un projet que j’avais depuis 10 ans. Mais je n’avais ni le temps ni les financements. En 2O15 la maison d’édition Hugo&Cie m’a proposé d’écrire un livre sur la culture Sneaker. Elle m’a fait une confiance aveugle. J’ai écrit ce livre pour encrer ma collection dans le temps, et surtout pour dire aux jeunes qu’il y a eu une genèse à tout ça. Je pars de la première basket moderne manufacturée de 1868 pour arriver au dernier modèle présent sur le marché en 2015. Les anciens peuvent aussi revivre cette histoire grâce au livre et les plus jeunes la découvrir.

Greg LaBranche & Pierre Faitot

Comment les Sneaker addicts ont-ils reçu ce premier ouvrage?

Au départ beaucoup n’ont pas compris l’intérêt de mon livre. Je ne voulais pas faire un catalogue. Pour moi, il était essentiel qu’y figurent des personnalités emblématiques comme George Eddy, qui a contribué à faire connaitre la NBA en France. Sydney, le premier Zulu de France, qui a importée la culture Hip-Hop. [H.I.P-H.O.P fut la première émission au monde à traiter de l’aspect culturel du Hip-Hop]. Le premier partenariat avec ADIDAS, avant RUN DMC, c’est Sydney, en 1983. Il y a aussi Thibaut de Longueville qui a réalisé le documentaire Just for Kicks (le culte des baskets) et bien d’autres. Tous ces gens ont contribué à faire sortir la sneaker du ghetto.

Vous devenez un personnage reconnu de la culture sneaker après un bras de fer avec les marques.

A mon retour des Etats-Unis au début des années 2000, je me suis aperçu qu’en France il y avait un certain engouement pour le produit. Les gens avaient cet amour pour la basket. En 2011 j’ai enfin décidé de fédérer une partie des passionnés, grâce à l’émergence des réseaux sociaux en m’intéressant au marché français car beaucoup de gens étaient mécontents de la distribution. La France est le premier consommateur de baskets d’Europe, pourtant les gens n’avaient pas accès à certains modèles. La distribution était chaotique.

Crédit: Greg LaBranche & Pierre Faitot

Crédit: Greg LaBranche & Pierre Faitot

 

A partir de là, vous organisez la résistance. Comment se met-elle en place ?

Sur Facebook je crée alors Save the Kikcs en 2011, une tribune libre où le consommateur pouvait pousser son coup de gueule ou son coup de cœur. Les gens ont adhéré spontanément. Par ce biais je me suis rendu compte qu’on pouvait aller plus loin. J’ai donc créée l’Union des consommateurs de sneakers (UCS,) qui regroupait plusieurs blogs influents. On représentait facilement 50 000 fans sur les réseaux sociaux ce qui m’a permis de m’adresser directement aux marques.

La Sneaker est-elle une question d’époque ?

Notre génération a clairement vu la genèse de tout ça. J’étais aux Etats-Unis quand la Jordan 1 est sortie et j’ai vu l’engouement. La connexion entre le Hip-Hop et la basket était évidente. Lorsque la Jordan 5 est sortie, dans les années 1990, j’étais à San Francisco, c’était incroyable ! Il y avait des bousculades dans les magasins et aux abords, les gens se faisaient racketter leurs paires, d’autres étaient carrément abattus pour cette Jordan. Le plus grand magazine américain de sport, Sport Illustrated, avait fait sa une avec une Jordan 5 et un revolver. Aujourd’hui, c’est devenu un produit de consommation courant. Moi, j’accorde beaucoup plus d’importance à la dimension historique. Ces paires sont le témoignage du temps qui passe et qui ne se rattrape jamais Dans ma collection chaque paire compte, je me rappelle en quelle classe j’étais; qui était mes copains du moment et ce que j’avais fait cet été là. La sneaker pour moi n’est pas juste un morceau de cuir qui décore mes pieds , mais belle et bien une culture au même titre que la culture HIP-HOP ou encore Rock .

Crédit: Greg LaBranche & Pierre Faitot

Crédit: Greg LaBranche & Pierre Faitot

La Sneaker est sorti du ghetto, ses codes ont été récupérés et démocratisés. Quel regard portez-vous sur ce phénomène ?

Je porte un regard biaisé car je suis dedans depuis longtemps. C’est donc difficile de prendre du recul. Néanmoins, j’ai constaté que l’émergence du Hip-Hop en France, comme aux Etats-Unis, va de paire avec la basket. Ce sont deux univers connexes car les Bboy rappeurs ont amenée cette culture dans la rue. Au départ les marques voyaient ça d’un mauvais œil, leur cible était plutôt les sportifs et la codification de la rue pouvait leur porter préjudice. Mais il y a eu une déferlante avec RUN DMC et elles ont su s’adapter. D’autant que c’était un business lucratif, le même que celui du rétro aujourd’hui. Le rétro est d’ailleurs entretenu car les paires qui fonctionnent toujours sont très anciennes : la Stan Smith date de 1965 ; la Adidas superstar de 1969. Le rétro marche à fond parce que les gens sont en quête d’authenticité, et pas seulement pour les baskets. Aujourd’hui avec l’omniprésence du rétro dans les collections, les marques cherchent à fédérer et à raconter une nouvelle histoire avec de nouveaux Consommateurs.

Pouvez-vous nous raconter un secret méconnu sur les baskets ?

La Jordan 3 : si on prête un peu plus attention à la semelle extérieure, les stries font référence aux navettes spatiales du film de George Lucas Star Wars. Dans les années 1980, les marques demandent aux designers issus de l’industrie automobile et aéronautique de créer les chaussures du futur. Ils s’inspirent donc des films de science-fiction. Puis il y a eu la thématique de la culture afro, comme pour la Nike Air Raid dont Spike Lee fera la promotion ou encore avec la Adidas Dikembé Mutmbo du pivot Congolais des Denver Nuggets. Le cinéma s’est intéressé à la sneaker en la mettant en avant dans des films cultes comme do The Right Thing avec la scène mémorable de la Jordan 4 qui est élevé au rang de chaussure bijou sur laquelle on ne doit pas marcher…. Nike et Reebok ont fait un vrai effort à ce niveau là parce qu’elles ont constaté que ceux qui portaient les baskets en dehors des terrains de sport c’était les noirs. Plus tard, la Adidas Torsion sort. C’est la première fois que cette marque sort un modèle tout noir. Ça donne un côté agressif à la paire. Avant les produits étaient juste blancs. Les Bboys se l’approprient en pensant «  je suis noir, je porte une basket noire » c’est un symbole. C’est comme ça que le produit a été récupéré en tous cas.
https://youtu.be/ljfA2y0RA_I
Quelles actualités découlent de la sortie de ce livre ?

L’exposition Sneakers, objets de désirs ou je suis un des collectionneurs prêteurs ( 250 Paires exposées) cours jusqu’au 13 janvier au Crédit Municipal de Paris. J’encourage vivement les lecteurs à y aller, l’entrée est gratuite. Les commissaires belges de la fondation Marinus qui sont à l’origine de cette expo m’ont sollicité en tant qu’expert référent. Plus personnellement, mon investissement depuis quelques années dans la culture sneaker en France m’a permis d’être choisi Nike France pour la réalisation d’une vidéo pour représenter pour les 30 ans Jordan Brand. Plus tôt dans l’année, exactement en fevrier je fus invité à l’anniversaire de Michael Jordan, c’est incommensurable, j’y ai rencontré des stars de la NBA des années 1990 Shaquille O’Neal, Magic Johnson, Scottie Pippen, Clyde Drexler, Dominique Wilkins, Docteur J, Ron Harper… Ce sont des opportunités qui arrivent parce que je me suis énormément investi. Je trouve important aujourd’hui de pouvoir mettre ne avant l’aspect culturel parce que c’est comme ça que les marques procédaient avant. Elles faisaient de la pédagogie avec les consommateurs. La basket a beaucoup de choses à nous apprendre sur nous-mêmes et comme je dis souvent, je m’en sers pour aller à la rencontre des gens.

 

Le livre Culture Sneaker : 100 paires mythiques aux éditions Hugo Image est disponible dans tous les points de vente habituels : la Fnac, Amazon, Cultura et dans une grande partie des librairies indépendantes.