Dans l’île de Bourbon (actuelle Réunion) s’était déroulé entre 1817 et 1843 le procès de Furcy, un esclave contre son maître pour l’obtention de sa liberté.
Par Sandro CAPO CHICHI / nofi.fr
Furcy naît en 1786 sur l’île de Bourbon. La mère de Furcy, Madeleine, d’origine indienne déportée de son pays à l’age de huit ans vers la France puis de Bourbon, avait été affranchie le 6 juillet 1789, mais sa liberté de droit avait été passée sous silence par sa propriétaire. Elle mourra 28 ans plus tard ayant vécu comme une esclave. Lorsque celle-ci avait entre temps découvert la vérité, elle avait demandé à son nouveau maître, Joseph Lory, de libérer son fils quitte à renoncer à ses 19 années d’indemnité dues. Mais elle avait du renoncer, devant les menaces de mort contre Madeleine et son fils Furcy et ‘oppos(er)a le silence à l’injustice’. Furcy, qui grâce à sa soeur affranchie après son mariage avait appris à lire et à écrire, décide de faire valoir son droit de liberté en 1817, à l’âge de 31 ans, que et trouve le soutien de Gilbert-Boucher, le procureur général de l’île. Après une simple demande où il proteste contre l’atteinte portée à sa liberté, Lory prend panique et demande l’aide de sa connaissance influente Desbassyns le commissaire général de l’île qui décide de l’envoyer en prison pour ‘marronnage’. Craignant une attaque en justice de la part de Furcy et une mobilisation populaire autour de l’affaire, Lory et Desbassyns décident et parviennent à exiler le prisonnier à Port-Louis (actuelle Île Maurice) en novembre 1818. Il y passera 18 ans et y entretiendra une correspondance avec Gilbert-Boucher, déchu de ses fonctions depuis son soutien à Furcy. Emancipé de droit par les autorités britanniques en 1829 pour ne pas avoir été déclaré à son arrivée comme un meuble à Port-Louis, il y travaillera comme maître d’hôtel et jardinier où il allait subir de terribles exactions de la part de son maître. Malgré les nombreuses demandes d’abandons de ses procédures judiciaires contre sa liberté totale, l’homme restera droit dans ses principes, refusant d’abandonner la cause de la justice pour son propre intérêt. A Port-Louis comme à Bourbon où s’affrontaient abolitionnistes et esclavagistes, l’affaire Furcy avait fait grand bruit. Le 23 décembre 1843, la justice parisienne déclare enfin que « Furcy est né en liberté.» Furcy refuse 10000 francs de dommages et intérêt et se met à son compte en tant que confiseur où selon la presse locale, il devient ‘l’une des notabilités de l’île’ de Port-Louis, se voyant toutefois interdit de retour dans son île natale sous peine d’emprisonnement.
Référence:
‘Autour de l’affaire Furcy, l’esclavage à la Réunion’ conférence du 22 janvier 2014, au théâtre Claude Lévi-Strauss / Mohammed Aïssaoui