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Palmares, un état noir dans le Brésil du 17ème siècle

Histoire

Palmares, un état noir dans le Brésil du 17ème siècle

Par Sandro CAPO CHICHI 3 février 2018

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Au début du 17ème siècle s’était constitué Palmares, un état créé par des esclaves fugitifs dans le nord-est du Brésil. Grandissant progressivement en importance, il résistera avec brio pendant près d’un siècle aux assauts des colons portugais et néerlandais avant sa destruction en 1694. Palmares survit aujourd’hui comme un symbole de fierté dans la mémoire collective des Afro-Brésiliens.

Par Sandro CAPO CHICHI

Palmares, un état noir dans le Brésil du 17ème siècle

Origines et structure

Palmares est un Mocambo, c’est-à-dire un peuplement d’esclaves noirs fugitifs fondé au plus tard vers 1606 dans le Nord Est de la colonie portugaise du Brésil. Il est plus récemment qualifié de Quilombo, un terme à la signification similaire en portugais brésilien contemporain. Mocambo, qui est probablement dérivé du mot ambundu mu-kambo qui signifie ‘cachette’. Quilombo est probablement dérivé du mot ki-lombo qui signifie, dans la même langue, camp d’initiation masculin et par extension, camp militaire. Cette prééminence du vocabulaire de ces langues parlées dans l’actuel Angola est probablement indicatrice de la forte présence d’esclaves originaires de cette région. Beaucoup d’habitants de Palmares pourraient bien avoir été des descendants d’esclaves d’origine imbangala dans l’actuel Angola. Palmarès était elle-même surnommée par ses habitants Angola Janga qui provenait peut-être du kimbundu ‘Angola Iadianga’ qui signifie le ‘premier Angola’. Le nom ‘Palmares’ est un nom portugais simplement donné en référence au grand nombre de palmiers situés dans la localité. Palmares était apparemment dirigé par un monarque élu ce qui a conduit certains observateurs à qualifier cet état de république. Il régnait sur une population essentiellement masculine de culture et de religion luso-africaine. La présence d’une église sur le territoire de l’état était par exemple contrebalancée par l’usage rituel des peaux de panthère.

palmares 

Les débuts

Les témoignages contemporains de l’histoire de Palmares ne nous proviennent malheureusement pas des habitants eux-mêmes, mais d’écrits de colons européens. On sait que dès 1612, les colons portugais lancèrent une expédition militaire pour se défaire de cette menace, sans succès. Les sources écrites sur Palmares ne réapparaissent qu’en 1634, où les Portugais font part du danger qu’ils représentent. A cette époque, les Néerlandais étaient entrés en guerre contre les Portugais.  Ces troubles avaient entraîné la migration de nombreux esclaves vers Palmares, qui était sans doute le plus puissant et le plus craint des Quilombos de cette époque. En 1640, les Néerlandais le voient à leur tour comme un  ‘danger’ et décident d’attaquer l’état d’alors environ 11000 habitants en 1643. Cette campagne n’a guère davantage de succès et laisse Palmares libre de toute attaque portugaise jusqu’aux années 1670.

Résistance et fin

Entre 1672 et 1680, des Portugais de l’Etat de Pernambuco lancent huit expéditions contre l’Etat de Palmares. Bien que deux d’entre elles causent des dommages sur l’état noir, ce dernier parvient à garantir sa souveraineté à un tel point qu’un des agresseurs portugais déclare en 1681 qu’aucune de leurs attaques n’a eu le moindre effet sur Palmares. Une attaque de 1677 a cependant eu un effet. Le chef de l’époque appelé (ou titré?) Ganga Zumba fut blessé et nombre de ses jeunes parents furent capturés. Il accepta la paix proposée par le gouvernement de Pernambuco qui autorisa son règne sur ses sujets à condition de quitter Palmarès pour Cacau, une zone plus proche de l’autorité du gouvernement et de restituer les esclaves fugitifs à ce dernier. Cet arrangement ne fut pas accepté par tous les habitants de Palmares et une partie d’entre eux resta sur place. A la tête d’entre eux se trouvait Zumbi, un chef et général militaire qui aurait empoisonné Ganga Zumba. Cette mort a pu être causé par la mise à mort du souverain qui dans de nombreux états africains traditionnels pouvaient être tués s’ils ne pouvaient remplir leurs fonctions royales. Zumbi fut couronné chef suprême de Palmares et mena une farouche rebellion contre les Portugais jusqu’en 1694. Entre 1692 et 1694, les Portugais isolèrent Palmarès grâce à des fortifications et parvinrent à faire le siège de la ville. Après 20 jours de siège, ils durent à nouveau avoir recours à un renfort composé de 3000 hommes.

Palmares

Statue moderne de Zumbi de Palmares au Brésil

En février 1694, au terme d’une campagne extrêmement coûteuse pour les Portugais, 500 habitants de Palmares moururent dans les combats ou en se jetant (ou tombant?) des murs de la fortification. Un autre demi-millier d’habitants furent capturés. C’était la fin de l’état afro-brésilien de Palmares. Zumbi parvient à s’échapper et continua à mener des guérillas pendant près d’un an. Après avoir été dénoncé par un de ses proches il fut tué le 20 novembre 1695. D’autres états refuges afro-brésiliens naîtront après la chute de Palmares mais aucun d’entre eux n’aura eu autant d’importance que Palmares ni une durée atteignant de près ou de loin son siècle d’existence. Une fondation historique à la résistance africaine au Brésil était née.