Neïba

Afropunk, le festival qui célèbre l’excellence noire

Culture

Afropunk, le festival qui célèbre l’excellence noire

Par SK 28 juillet 2017

Pour ne rien manquer de l'actualité,
téléchargez l'application depuis ce lien
Recevez du contenu exclusif, de l'actualité, des codes promos Nofi Store ainsi que notre actualité évenementielle chaque week-end !

Plus qu’un festival, Afropunk est un mouvement et l’unique événement internationale qui célèbre l’excellence noire; ou plutôt l’excellence d’être noir. Surtout, ce concept soulève la question fondamentale : Qu’est-ce qu’être Noir ? Ou plutôt, comment être Noir dans une société obtuse qui s’applique à mettre chacun dans une case ? La troisième édition de l’Afropunk Fest Paris, les 15 et 16 juillet 2017 à La Halle de la Villette a été l’occasion de se replonger dans ce concept.Afropunk, un festival libérateur à la conquête des consciences noires.

Le Blackness

Il n’y pas d’équivalent dans la langue française pour retranscrire l’idée du « Blackness ». On Pourrait grossièrement la traduire par l’expression empreinte de fierté du fait d’être Noir. Cette expression s’impose comme un cri, comme dire qu’on est Noir et Fier, en raison de l’énergie déployée pour affaiblir, avilir, détruire l’homme et la femme noirs à travers l’histoire. En Europe, en France particulièrement, la notion est plus abstraite parce que construite sur une contradiction entre le stéréotype, qui fait d’un individu ceci ou cela selon sa couleur de peau et ses origines présupposées. Et l’individualité de chaque Noir au parcours singulier, qui tente de ressembler à ce que ses congénères semblent attendre de lui, et essaie aussi de s’affirmer dans son identité. Mais qu’est-ce qu’être noire au juste ? Cette quantité d’hommes et femmes peut-elle se restreindre à une seule vision ? Evidemment non. Mais les stéréotypes et les absolutismes ayant la peau dure, les communautés noires elles-mêmes se sont enfermées dans cette définition catégorique : l’anti-oncle Tom (Noir « vendu ») est selon ce que l’industrie a voulu, un homme d’une virilité factice exacerbée, qui apparaît comme le gangster dangereux et macho. La caricature du rappeur, le terme rappeur regroupant évidemment tout Noir faisant de la musique inclassable dans le rayon variété. On les a regroupés sous une bannière nommée « Hip-Hop », avec tout  le mépris que ce concept vidé de sa substance implique, pour dériver aussitôt vers « Ghetto», plus explicite dans l’idée dominante. Ainsi, le Noir validé devint « le Noir Ghetto ».

VOUS AIMEREZ AUSSI:

Ces groupes et chanteurs noirs qui font du rock

Hip-Hop story

Le Hip-Hop est un mouvement musical et sociétal puissant, qui a fait beaucoup pour la promotion des afro américains dans l’industrie musicale. Surtout, il a permis de porter à grande échelle les revendications des jeunes des quartiers défavorisés des Etats-Unis. Conscients de la force de frappe de cette création sociologique noire, les Etats-Unis et plus tard les autres pays, déployèrent toutes leurs forces pour ne le réduire qu’à la musique, et en retirer tous les profits. Néanmoins, l’image vulgarisée du Noir bon qu’au rap (pour concurrencer le sport) fut l’imaginaire qui arrangea bien. Puis, pour d’autres raisons plus fidèles à la véritable raison d’être du mouvement, les communautés noires se l’approprièrent réellement, forçant parfois le trait, se réduisant elles-mêmes à cela. Ainsi, le Noir lambda se revendiquait Hip-Hop, rejetant toute autre forme de Blackness.

 

Le rockeur n’étant pas un « vrai » noir, le punk encore moins, sans parler des Noirs du classique. Une subdivision supplémentaire et inutile qui divisa davantage ces Noirs déjà si peu unis. Bref, les « non-hip-hop » furent mis de côté, exclus de leur droit fondamental et inhérent d’exprimer leur condition de noir, différent de cette construction. Pourtant, comme le rappelait le mélomane Disiz dans son interview donnée à NOFI lors du festival Afropunk Fest à Paris les 15 et 16 juillet 2017 ; considérer le rock, la pop et tous les autres mouvements musicaux comme des musiques de « blancs », dénote un cruel manque de connaissance de l’essence même de ces musiques qui tirent leur source dans le génie Noir. En 2003, le documentaire Afropunk de James Spooner a mis en lumière cette partie de la communauté rejetée pour son look punk-rock, son mode de vie particulier, ses références et ses orientations sexuelles. Car en effet, la question de l’homosexualité, surtout son rejet total et entier, a toujours occupée une place importante dans la vision des Noirs en général et du milieu Hip-Hop en particulier. Le travail de James Spooner a permis de démontrer cette incompréhension de l’étendue de la culture noire et donc de la diversité des communautés noires. Il a généré une réelle prise de conscience de cette assimilation au modèle industriel fabriqué et encouragé une recherche plus approfondie et une remise en question de cette certitude grotesque.

Rassembler, fédérer, sublimer

Le concept Afropunk c’est l’expression de l’art, par l’expression de soi. A Brooklyn, les américains Jocelyn Cooper, son partenaire Matthew ainsi qu’un français expatrié aux Etats-Unis à l’époque, Lou Constant Desportes, ont initié un mouvement culturel : le festival Afropunk. Un événement qui s’est automatiquement transformé en un rendez-vous  annuel incontournable de la culture noire. Brooklyn, New York, Londres et Paris depuis trois ans. L’Afropunk c’est, la revalorisation des communautés indifférentes parfois opposées, réunifiées en un panel esthétique et inspirant d’une communauté noire dans sa diversité. Un mouvement philosophique, un espace hors du temps où beauté et talents noirs s’expriment dans une  parfaite harmonie. Aucun jugement, aucun complexe, aucun déni. L’Afropunk c’est être soi et le célébrer. La prochaine édition se tiendra à Brooklyn le 25 août.

Nous ne sommes pas un ; nous sommes plusieurs individualités capables de faire un lorsque cela est nécessaire.

 

VOUS AIMEREZ AUSSI:

Afropunk Fest, quèsaco ?