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Lettre ouverte pour que des rues portent le nom des « héros d’Afrique »

Société

Lettre ouverte pour que des rues portent le nom des « héros d’Afrique »

Par Redaction NOFI 25 novembre 2019

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Le Ministère des Armées et l’Association des Maires de France ont signé, le 20 novembre, une convention afin que des rues, des places et des bâtiments publics portent le nom des « héros d’Afrique » qui ont participé à l’armée française de Libération. L’appel avait été lancé par le chef de l’État, le 15 août 2019, lors du 75ème anniversaire du débarquement de Provence, à Saint-Raphaël. En août, le Pr Marcel Lourel, commandant de réserve à Lille, lance une lettre ouverte aux Maires de France et des Outre-mer, signée par plus 190 responsables associatifs, intellectuels et personnalités, afin que les élus s’engagent dans ce sens. Le Pr Marcel Lourel salue la convention entre les Armées et l’Association des Maires de France.

LETTRE OUVERTE AUX MAIRES DE FRANCE MÉTROPOLITAINE
ET DES OUTRE-MER

Madame, Monsieur le Maire,
« Passant, ils sont tombés fraternellement unis pour que tu restes Français. ». L’épitaphe du Monument aux morts de Fréjus à la mémoire des combattants d’Afrique noire de Léopold Sédar SENGHOR résonne.
Les mots du poète sénégalais matérialisent le rôle crucial des troupes d’Afrique et de l’ensembles des Outre-mer (Tirailleurs Sénégalais, Algériens, Indochinois, Goumiers et Tabors Marocains, Pieds-noirs, Marsouins du Pacifique et dissidents des Antilles…) lors du débarquement de Provence, en Afrique du Nord, en Italie et en Corse.
Dès 1940, le 25e RTS (Régiment de Tirailleurs Sénégalais) est déployé à Chasselay-Montluzin afin de stopper la progression des troupes allemandes vers Lyon. Ils se battent jusqu’à épuisement des munitions. Contraints de se rendre, ils sont victimes des exactions racistes commises par les Nazis. Les mitrailleuses des chars ouvrent le feu, exécutent les hommes dans le dos, tandis que les blindés achèvent les blessés sous leurs chenilles. 52 tirailleurs sont massacrés. La même année, le 4e RTS contribue à la défense de Menton (Alpes-Maritimes) contre les troupes italiennes.
Félix Éboué, né en Guyane et Gouverneur du Tchad, une possession française, se déclare partisan du général de Gaulle après l’appel du 18 juin 1940. Il range le territoire du côté de la France libre. Grande figure de la Résistance de la France d’Outre-mer, il repose au Panthéon.
En septembre 1943, la Libération de la Corse s’opère grâce notamment au 1er régiment de Tirailleurs Marocains et au 2e groupement de Tabors Marocains avec l’aide des patriotes corses.
15 août 1944, le débarquement de Provence a lieu. 225 000 hommes des Tirailleurs Sénégalais et Algériens, Goumiers et Tabors Marocains, Pieds-noirs, Marsouins du Pacifique et dissidents des Antilles versent le prix du sang. Certains Polynésiens et Néo-calédoniens s’engagent dans le bataillon du Pacifique et participent à la bataille de BIr-Hakeim. C’est toute l’Afrique coloniale, mais aussi toute la France d’Outre-mer, des Antilles à la Nouvelle-Calédonie qui se bat pour l’idéal de liberté, pour la République, s’acquittant d’un lourd tribut pour la France.
Ils débarquent en Provence sous le commandement du général de Lattre de Tassigny. C’est sans compter l’aide de la résistance locale. L’Armée « B » libère Toulon, Marseille et Fréjus fin d’août 1944, devançant le calendrier tactique de plusieurs semaines. L’Histoire montre, hélas, que la mémoire collective a trop longtemps oublié ces faits d’arme. Malheureusement, ce fut également le cas lors du Premier conflit mondial. En 1914-1918, pas moins de 200 000 « Sénégalais » de l’Afrique-Occidentale française (A.O.F. : Mauritanie, Sénégal, Soudan français [devenu le Mali], Guinée, Côte d’Ivoire, Niger, Haute-Volta [devenue le Burkina Faso], le Dahomey [devenu le Bénin]) se battent sous l’étendard français, dont plus de 135 000 rien qu’en Europe. Environ 15 % d’entre eux, soit 30 000 soldats, y trouveront la mort sur un total de 1 397 800 soldats français morts durant ce seul conflit soit plus de 2 % des pertes totales de l’armée française. Il faut y ajouter tous les soldats venus d’Afrique du Nord, de l’Indochine et du reste de l’Outre-mer (Antilles, Guyane, Réunion, Madagascar, Indochine, établissements français de l’Inde, de Saint-Pierrre et Miquelon…) qui combattirent dans les tranchées, aux Dardanelles et en Afrique. Beaucoup sont revenus blessés ou invalides.
Lors du 75e anniversaire du débarquement de Provence, le jeudi 15 août 2019 à Saint-Raphaël dans le Var, Monsieur le Président de la République a rappelé que la France a une part d’Afrique en elle, tout en appelant à renommer des rues en hommage aux soldats africains et des Outre-mer de l’Armée française qui ont participé à la Libération.
Nous nous associons aux nombreux fils, petits-fils de Tirailleurs sénégalais et fils, petits-fils de militaires du rang, et nous saluons un acte républicain fort et apaisé qui honore la France, et avec elle, la Nation.
En conséquence de quoi, nous avons l’honneur de nous faire écho à une mémoire oubliée, celle de ces combattants – à égale distance celle des familles – souhaitant que vous puissiez prendre part au vœu du chef de l’État en rebaptisant des rues en hommage aux soldats africains et de l’ensemble des Outre-mer qui ont participé à la Libération.
Nous comptons sur votre attention particulière.
Respectueusement,

Pour signer la lettre ouverte veuillez contacter :
Marcel Lourel
Professeur des universités
ESPE Lille Nord de France
Commandant de réserve
Mail : lourelmarcel@gmail.com
Vous pouvez découvrir la liste des signataires en clicquant sur :  » Télécharger » ci-dessous .