Esclavage, Racisme et discriminations : Malaak Shabazz, la fille de Malcolm X se confie à cœur ouvert
Culture

Par Sébastien Badibanga 21 février 2015
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Venue à Paris à l’invitation du CRAN dans le cadre du Black History Month et de la semaine anti-coloniale, Malaak Shabazz, la fille de Malcolm X a plaidé, à la Bellevilloise lors d’une conférence tenue samedi 14 février 2015, en faveur de la poursuite du combat initié par son père, assassiné le 21 février 1965, il y a 54 ans jour pour jour. Elle s’est prononcée sur l’Esclavage, le racisme ainsi que les discriminations dont les Noirs, notamment des États-Unis et de France, sont encore victimes aujourd’hui.
Arrivée en France pour participer au Black History Month ainsi que pour honorer la mémoire de son père, Malcolm X, assassiné le 21 février 1965, Malaak Shabazz a participé mardi 10 février au point de presse tenu sur le Parvis du Panthéon et à la visite guidée du « Paris Noir », puis, elle a tenu une conférence-débat autour de la question du racisme qui a eu lieu à la prestigieuse université française La Sorbonne Paris. Avant de rencontrer, mercredi, les 18 du 57, les 18 coiffeuses exploitées et sans-papiers en lutte depuis plus de trois mois pour obtenir leur régularisation. Jeudi 12, la co-présidente de la sous-Commission de l’ONU s’est rendue à la Mairie de Massy-Palaiseau et au Cifordom, avant de débtattre l’après-midi avec des jeunes de Bondy et d’assister à la projection-débat autour du documentaire « Make it Plain » sur la vie de Malcolm X. Vendredi 13, elle a dîné et débattu au restaurant Novarts dans le 19e arrondissement. Enfin, samedi 14 et dimanche 15, elle a participé à la semaine Anticoloniale à la Bellevilloise, dans le 20e arrondissement parisien, et rendu hommage à son père.
(Interview Nofi)
Nofi : Quel est l’objet de votre visite en France ?
Malaak Shabazz : A l’invitation du CRAN, je suis venue passer une semaine en France, du 9 au 15 février, à l’occasion du Black History Month et de la semaine anti-coloniale. J’essaye, du mieux que je peux, de poursuivre le flambeau de mon père et de mettre en valeur mon propre combat. Avec la fondation « Malcolm X et Betty Shabazz », j’œuvre pour la cause noire à travers la planète. De plus, je suis à Paris pour promouvoir la décennie des personnes d’ascendance africaine (2015-2025). Quand je suis arrivée dans l’Hexagone, j’ai constaté plusieurs choses, touchant particulièrement les Noirs français, qui se déroulaient aux États-Unis il y a des décennies. Ce n’est pas facile d’être Noir ici mais il n’est pas impossible de faire évoluer les choses.
Qu’avez-vous trouvé de choquant à Paris ?
La jeunesse a perdu ses repères. Je pense qu’il faut des repères à ces jeunes afin de leur permettre de trouver leur chemin et avoir un but dans la vie. Par mon action, je m’efforce de faire avancer les choses en matière des droits de l’Homme et civiques. L’idée c’est de faire évoluer l’arsenal judiciaire dans l’ordre de protéger tous les citoyens contre les discriminations. Par exemple, j’ai assisté à un fait divers en France : la situation de non-droits des travailleurs africains immigrés exploités par leurs patrons. Aux États-Unis, cette situation ne pourrait pas arriver grâce aux lois encadrant ce genre de cas.
Quelle est la différence entre le modèle d’intégration à la française et celui des Etats-Unis ?
Aux Etats-Unis, on a un peuple uni. Malgré notre diversité, on est tous Américains. Personne ne s’étonne qu’on soit Noir et Américain, Asiatique et Américain ou Indien et Américain. Nos origines ne nous empêchent pas d’être considérés comme des Américains à part entière. C’est pourquoi je ne comprends pas pourquoi en France, on ne met pas en avant la diversité du peuple français sous prétexte qu’ils ont des origines étrangères. Si aux Etats-Unis, on parvient à intégrer tout le monde, c’est possible d’y arriver ici dans l’Hexagone. Mon message est un message de tolérance et de paix (applaudissement).
Vous êtes co-présidente de la sous-commission de l’ONU pour l’élimination des discriminations. Certains Noirs français et américains exigent une réparation de l’Esclavage. Quelle est l’action à entreprendre pour réclamer un dédommagement ?
Les pays qui se sont partagés les colonies en Afrique doivent payer la réparation de l’esclavage. Chaque pays, comme la France et l’Allemagne, doit prendre ses responsabilités. Les réparations doivent être demandées au nom de la traite négrière du passé et du présent. Je fais référence à l’abolition et au rétablissement par la France de l’esclavage à deux reprises. Cela explique pourquoi les Etats-Unis ont demandé à récupérer la Louisiane. Alors que tous les pays avaient aboli l’esclavage, la France, elle, l’a rétabli aux Antilles.
Est-ce légitime d’entreprendre une action judiciaire pour obtenir réparation ?
Il s’agit de l’esclavage institutionnel. Tout le monde se demande à qui doit-on réclamer une réparation ? C’est légitime de se faire dédommager des crimes commis par les pays esclavagistes, car il y a eu des pertes humaines et des bénéfices économiques. Toutefois, il faut reconnaître qu’une telle action de réparation va être difficile à mettre en place. Mais, il ne faut pas baisser les bras. La banque Barclays, par exemple, a tiré des bénéfices non négligeables de l’esclavage. Individuellement, ce sera difficile de porter plainte mais il faudra constituer des « class action » (des actions collectives) pour obtenir réparation.
Ce 21 février 2015, cela fait 50 ans que votre père, Malcolm X, a été assassiné. Savez-vous maintenant qui l’a tué ?
Je n’ai pas envie de m’étendre sur le sujet. Je pense que ça doit être un complot.
PS : Malaak Shabazz n’a pas pu répondre à toutes nos questions par manque de temps.