CHINE-AFRIQUE : DES RAISONS DE CRAINDRE LE PIRE
Politique

Par SK 15 octobre 2014
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Le 25 août dernier, le président zimbabwéen Robert Mugabe a entamé une visite de cinq jours en Chine, la treizième depuis qu’il dirige son pays
Il a été accueilli en grandes pompes par les officiels chinois, notamment lors d’une cérémonie à la majestueuse et tristement célèbre place Tian’anmen. Officiellement, l’objet de la visite du président zimbabwéen visait le raffermissement des relations d’amitié qui unissent les deux pays. Mais dans les faits, le Zimbabwe a cruellement besoin d’aide, surtout depuis le début des années 2000 quand le pays s’est entamé une politique de nationalisations. A l’époque, les grandes exploitations agricoles, presqu’entièrement dirigées par des Blancs, leur ont été arrachées et redistribuées au Noirs. Ce qui a entrainé le pays dans une crise économique et alimentaire sans précédent. Le Zimbabwe qui jusqu’alors était le grenier de l’Afrique australe s’est retrouvé en train de quémander de l’aide.
Dans sa politique de volte-face vis-à-vis de l’Occident, le président Mugabe a dû trouver des partenaires de substitution et c’est tout naturellement qu’il s’est tourné vers la Chine, laquelle ne se fait pas prier pour apporter de l’argent bien frais. En 2013, la Chine a ainsi investi près de 602 millions de dollars au Zimbabwe. La question qu’on pourrait se poser est la suivante: quelle est la contrepartie d’investissements aussi conséquents?
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La question ne se pose pas seulement pour le Zimbabwe, mais pour la majorité des pays africains qui ont multiplié durant ces dernières décennies les relations dites d’amitié avec la Chine. Quelle contrepartie la Chine attend-t-elle de tous ces milliards qu’elle déverse tous les ans en Afrique? Car il est d’ores et déjà certain que ce n’est pas de la philanthropie.
La situation est inquiétante pour l’Afrique quand on tente une analogie entre la Chine d’aujourd’hui et l’Europe d’il y a un ou deux siècles et même d’aujourd’hui. La Chine est dans une phase de développement accrue. La Chine n’est plus ce pays où les gens se contentent d’un bol de riz et d’une bicyclette. Les chinois ont aujourd’hui besoin de plus de routes, de plus de voitures, ils sont entrés dans une ère de consommation. Tous ces biens doivent provenir de quelque part. Et malgré son immensité et l’ingéniosité des Chinois, la Chine ne produit pas tout. Il faut aller chercher ailleurs ce qui fera prospérer l’économie chinoise et assurer le maintien ou l’accroissement du niveau de vie des citoyens de l’Empire du Milieu. Et ce grand continent plein de matières premières et assez désorganisé qu’est l’Afrique est aujourd’hui la cible de la Chine. Comme elle l’a été pour l’Europe.
Les mêmes causes produisant presque toujours les mêmes effets, les principaux lésés seront les africains. Car malgré ce qu’en disent les anti-occidentaux qui préfèrent se tourner vers la Chine, la configuration du continent vis-à-vis de ce nouveau géant affamé et assoiffé est la même que celle qui a été en d’autres temps vis-à-vis de l’Occident.
Selon une étude, la Chine a investi plus de soixante-quinze milliards de dollars en Afrique entre 2000 et 2011, notamment sous forme d’annulations de dettes et d’aides au développement. Ces aides au développement sont principalement destinées aux infrastructures (autoroute de Grand-Bassam en Côte d’Ivoire, barrage hydroélectrique de Zongo 2 en RDC, construction d’un opéra à Alger, etc).
L’approche est moins cynique que celle utilisée par les Occidentaux (les français par exemple sont réputés comme étant ceux qui viennent exploiter les richesses d’un pays tout en n’investissant que dans des préfabriqués qu’ils peuvent replier et emporter quand besoin est) mais la finalité est la même: faire main basse sur les richesses africaines. Sinon, comment comptons-nous rembourser ces milliards de dollars d’aides et de prêts en tous genres que nous acceptons de la part de la Chine, si ce n’est en leur octroyant à titre de compensation l’exploitation de mines de platine et de diamant (comme c’est le cas au Zimbabwe) ?
Le procédé est moins cynique car pour les tenants de l’aide chinoise, ils ne fomentent pas des instabilités, des guerres et des crises pour investir le continent. Ils n’ont pas l’attitude hypocrite des pays occidentaux qui arguent de vouloir préserver l’intégrité et l’indépendance de nos pays alors qu’en réalité, ils la sabordent. La Chine a beau jeu de ne jamais s’exprimer sur la situation politique de nos pays, mais il ne fait aucun doute que comme les autres, elle profite de l’instabilité notoire du Continent pour faire ses petites affaires.
A l’observation, beaucoup de pays africains qui ont entrepris de collaborer avec la Chine sont en train de retomber dans le même piège que celui que nous ont tendu les occidentaux à une certaine époque. Les leçons des expériences passées n’ont visiblement pas tirées. Car il viendra fatalement un moment – si ce n’est déjà arrivé – où les amis chinois réclameront la réciprocité des faveurs qu’ils nous accordent. Et ce ne sera que tout naturel. Car il est une vérité, et le général Charles de Gaulle l’avait si bien formulée, les États n’ont pas d’amis, ils n’ont que des intérêts.
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